Gwen Breës interpelle le Bourgmestre de Bruxelles : N’EN RAJOUTEZ PAS DANS LE CYNISME!

Alors que plusieurs dizaines de lieux culturels ont annoncé la reprise d’activités publiques à partir du Premier mai, Philippe Close, le Bourgmestre de Bruxelles, fait pression sur les organisateurs et les directeurs de théâtres pour freiner le mouvement. Gwen Breës, proche de “Still Standing for Culture”, lui a répondu vertement ce jour via les réseaux sociaux.

Monsieur Close,

Ça fait six mois et plus que le secteur culturel est “raisonnable” et attend des gestes, des actes, des dates, des perspectives… Ça fait six mois et plus que le gouvernement n’a jamais daigné prendre le temps de s’y intéresser, tandis qu’il n’a jamais trouvé “trop tôt” d’ouvrir les H&M, Zara ou Ikea, jamais “trop tôt” de laisser les métros être bondés quotidiennement, sans distances, sans gel.

Les lieux qui vont ponctuellement ouvrir au public entre le 30 avril et le 8 mai mènent une action politique limitée dans le temps, vous le savez parfaitement. Ils le feront en appliquant les protocoles sanitaires validés par les pouvoirs public l’an dernier. Les personnes qui y seront accueillies le temps d’un spectacle, d’un débat ou d’un film, courront beaucoup moins de risques que s’ils passaient le même temps dans les rayons de MediaMarkt ou agglutinés dans les transports en commun.

D’ailleurs que dire des “hors-la-loi”, quand le gouvernement fédéral gère les restrictions à coups d’arrêtés ministériels sans fondements légaux suffisants, sans débat parlementaire, sans respecter le droit du travail ou le principe d’égalité des citoyens devant la loi…?

Monsieur Close, les lieux culturels totalisent 9 mois de fermeture sur les 13 derniers. 9 mois sur 13 ! En aucun cas, ils ne peuvent être tenus responsables de la situation sanitaire. Et pourtant, leur réouverture est désormais conditionnée à l’avancement de la campagne de vaccination et au taux d’occupation des lits en soins intensifs ! En clair : ils rouvriront si les Belges ont à coeur de se faire vacciner, si les livraisons de doses vont bon train, si les autorités organisent correctement la vaccination, si un nouveau variant n’apparaît pas, s’il n’y a pas de relâchement des comportements, si la réouverture des commerces et bientôt des terrasses ne fait pas remonter les courbes, etc.

Aucun autre secteur n’est tributaire d’autant de conditions (et elles s’accumulent en ce moment : expériences “pilotes”, ventilation, etc.), alors que ces salles, où il est facile de laisser des sièges vides entre les spectateurs, sont des lieux sûrs. Toutes les études le démontrent depuis des mois : le risque de contagion y est infiniment plus faible que dans une grande surface ou un métro. Une récente étude menée dans 114 régions d’Europe montre que l’effet de la fermeture des lieux de loisirs et de culture sur les courbes de contamination est infime (3 %) par rapport aux effets attribués à la fermeture des entreprises (35 %), ou à la fermeture des commerces et services de proximités (12 %).

Cette manière de temporiser sans cesse, de charger le secteur culturel, de conditionner sa reprise aux aléas des contacts sociaux générés par d’autres secteurs est abjecte. Sanitairement irrationnelle. Tout sauf “raisonnable”. C’est à ces choix politiques faits par le fédéral que s’adressent les actions d’ouvertures. Pas aux bourgmestres. Alors si vous envoyez votre police à l’entrée des lieux qui manifestent pour une cause juste et de manière responsable, ayez au moins l’honnêteté de le faire au nom de votre rôle d’autorité administrative, au nom de la décision des procureurs. Mais n’en rajoutez pas dans le cynisme. Nous en avons déjà eu notre dose.

Gwen Breës (Cinéma Nova) / publié sur les réseaux sociaux

Complément d’information :

« L’article 23 consacre le droit à mener une vie conforme à la dignité humaine, droit qui comprend notamment le droit au travail. Quant aux articles 10 et 11, ils interdisent les discriminations. Or, aujourd’hui, certains travailleurs sont autorisés à travailler alors qu’on interdit à d’autres de le faire. (…) Il y a donc bien une discrimination faite à un secteur. Bien sûr, des différences de traitement sont autorisées, mais elles doivent être prévues par la loi, de manière proportionnée et avec des objectifs légitimes. Ici, il n’y a aucun élément qui permette de dire qu’un travailleur dans un cinéma, où les gens sont assis, masqués, avec distance sociale et sans bouger, prendrait plus de risque que le travailleur d’un magasin de vêtement bondé, où les gens circulent constamment et où le système de ventilation n’est pas optimum. »
L’avocate Véronique Dockx dans Le Soir (28/04/2021)
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