Eh bien, là, les non-vaccinés, j’ai très envie de les emmerder. Et donc, on va continuer de le faire, jusqu’au bout. C’est ça, la stratégie“.
Cette déclaration d’Emmanuel Macron dans le quotidien “Le Parisien” du 4 janvier est sans doute un point de bascule de l’élection présidentielle française.
En digne héritier du Père Ubu, Macron vient en effet d’inventer une nouvelle arme politique : la merdre.
Or les autorités académiques sont formelles : il n’y a que la merdre qui peut emmerder.

La “Une” du “Monde”. “Réfléchie”, mon cul ! Si Mélenchon avait dit le tiers du quart, il aurait été sur le champ éventré dans tous les médias.

A noter qu’il ne s’agit pas ici d’une “parole volée”, d’un doigt d’honneur immortalisé par un Iphone voyeur ou un micro indiscret, mais d’une interview “officielle” dans un quotidien français, et relue donc par le principal intéressé.
Dans la même interview, Macron enfonce d’ailleurs le clou avec les non-vaccinés : “Un irresponsable n’est plus un citoyen“.
Le député LFI François Ruffin lui a aussitôt répliqué qu’un supprimant 5700 lits d’hôpitaux en 2020, en pleine pandémie, les “irresponsables” étaient peut-être d’abord à chercher dans son propre gouvernement.
Ainsi, comme François Hollande avait déshonoré son quinquennat avec sa très nauséabonde “déchéance de nationalité“, l’actuel président français embrene le sien avec sa virtuelle “déchéance de citoyenneté” – pour reprendre le joli titre d’Ellen Salvi dans Médiapart.
Macron désigne des boucs émissaires : le degré zéro de la pédagogie sanitaire“, constate dans le même média une autre journaliste, Caroline Coq-Chodorge. “Jamais sous la Vème République, un chef de l’état n’a été aussi loin dans la stigmatisation d’une catégorie Français“, concluait, ce même jour, Arnaud Benedetti dans une tribune du “Figaro”.
Face à l’actuelle vague d’Omicron, ce très contagieux variant du SARS-COV-2 qui fait exploser toutes les courbes de contagion, Macron a donc déjà désigné les prétendus “coupables” : les “non-vaccinés-qu’on-va-emmerder-jusqu’au-bout-c’est-la-stratégie”.

Du vaccin, il est passé sans transition au vax-haine.

Pourtant, selon les plus récents chiffres de la DREES (1), les vaccinés “comptaient pour 75% des cas de contagion entre le 22 novembre et le 19 décembre 2021” (2). Une proportion qui devrait encore s’être accrue depuis, puisque “Omicron, capable d’échappement immunitaire, infecte le plus souvent des personnes déjà infectées ou vaccinées” (2).
Or ces “non-vaccinés”, que les medias mainstream s’obstinent souvent à appeler “anti-vax”, forment un ensemble hétérogène que rien ne semble vraiment rassembler, si ce n’est les pierres qu’on leur jette.
On y trouve par exemple, en France, plus de 500.000 vieillards isolés de plus de 80 ans, et 72% d’ados de moins de 18 ans (3).
Tous ces gens-là auraient sans doute besoin qu’on aille à leur rencontre. Mais certainement pas qu’on les “emmerde”, qu’on les insulte ou qu’on les méprise.
En livrant ainsi les non-vaccinés à la vindicte populaire, en allumant le ventilateur à merde, en leur pissant à la raie, en les clouant au pilori, le président français ne commet donc pas seulement une faute morale et politique. Il se trompe de diagnostic et fait une erreur médicale.

 

Claude Semal 7 janvier 2022

 

Sur le même sujet, on lira aussi avec intérêt LES TRIBUS NON-VAX, PORTRAIT D’UNE NON-FAMILLE

(1) La Direction de la Recherche, des Études, des Évaluations et des Statistiques, une administration sous l’autorité du gouvernement français.
(2) Vincent Bordenave, “Quel rôle jouent les réfractaires dans l’épidémie ? “, Le Figaro, 7 janvier 2022.
(3) Sauf indication contraire, les chiffres cités proviennent du dossier du “Figaro” du 7 janvier 2022.

 

L’ami Michel Buhler s’est penché sur l’origine du Machin ;-).