PAS LE COEUR A LA FÊTE
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PAS LE COEUR A LA FÊTE

Publié le 9 mars 2022 par Semal
Logiquement, cela aurait dû être la plus grosse teuf de l'année. Trois jours de carnaval, d'huîtres dans la bière, de confettis sur les brochettes, partout et sans masques. (Photo Anouchka / Théâtre de Poche)

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Logiquement, cela aurait dû être la plus grosse teuf de l'année.
Le printemps avant la lettre.
Trois jours de carnaval, d'huîtres dans la bière, de confettis sur les brochettes, partout et sans masque. On aurait fait péter le Cava et le concept. Sorti les tables et les bouteilles dans la rue. Embrassé les voisins. Brûlé les vieux masques et les tests transgéniques usagés en tas sur la chaussée. Dansé jusqu'au bout de la nuit.
Le Bois de la Cambre, puissance dix, mais sans les autopompes.
Et à Liège, le Parc de la Boverie, rebaptisé "de la Beuverie", aurait été intronisé en dancing permanent.
Vous vous rendez compte ? Enfin, enfin, la délivrance !
La fin du tunnel, après deux ans de peur, de fermetures des cafés, de quarantaines à la chaîne, de confinements généralisés, d'interdiction de danser, d'exclusions des non-vaccinés, de QR code obligatoires, de CODECO permanent, de Covid Safe Ticket dans ton cul et de lois sanitaires édictées sur ordonnance !
Eh! bien non.
Juste une petite fiesta au Théâtre de Poche, style braséro, Chardonnay et bières locales, comme ils en font 185 par an. Quatre étudiantes de l'INSAS qui dansent vaguement devant un bar, ça ne compte pas.

Sacré Poutine. Il devait avoir l'œil fixé sur la courbe des chiffres de Sciensano, ou les "live" du CODECO en boucle dans sa salle de bain, attendant le meilleur moment pour nous pourrir la vie.
Ca y est, les Belges sortent du tunnel ? Tenez, prenez ça dans la gueule ! Et boum !, il envoie ses chars envahir l'Ukraine...
Mais qu'est-ce qu'on lui a fait, à ce Poutine !?
Évidemment, nous, cela nous a un peu coupé le sifflet. On n'est pas des bêtes. Le Belge est un grand sensible.
Notez bien que, malgré notre grande sensibilité, la guerre chez les autres, généralement, on s'en tamponne la barquette de frites. Cela ne nous a jamais empêché de digérer ni de ronfler. Enfin, quand je dis "nous", c'est une facilité de langage. Car il y a toujours eu aussi, chez nous, quelques solidaires solitaires qui veillaient au chevet des malheurs du monde. Et "gardaient la lampe allumée" (Bertin).
Tant que cela se passait au Yémen, en Syrie, en Érythrée, "nous" arrivions généralement très bien à "vivre avec". D'ailleurs, nos journaux et nos télés n'en parlaient (pratiquement) jamais.
Comme le disait Jacques Chirac, cela nous en touche une sans faire bouger l'autre (important, le Chirac : un journaliste doit toujours citer ses sources, même discrètement poilues).
Mais l'Ukraine, c'est différent. On se sentirait presque en famille. Car rien ne ressemble plus à un soldat ukrainien que mon plombier polonais.

Tenez, regardez Sammy Mahdi, notre secrétaire d'État à l'Asile, à la Migration (et à la Loterie Nationale, pour bien nous faire comprendre que notre politique d'accueil, c'est d'abord une tombola). Pas un tendre, pourtant.
Le type qui a décidé, une fois pour toutes, de tirer l'échelle derrière son père, pour être sûr que plus personne jamais ne lui piquera la place.
Du genre à aller crever lui-même les dinghys orange à la fourchette en Méditerranée, pour être sûr que les réfugiés n'arrivent jamais à la nage jusqu'au Petit Château à Bruxelles. Eh! bien là, c'est l'inverse.
Les Ukrainiens, il organiserait presque un pont aérien d'autocars pour aller les chercher sur place. Il parait qu'il aurait même été demander conseil aux logeuses du Parc Maximilien.
Serviable, le gars. Gentil. Le sandwich sur la main. Welcome Refugies !
Oui, je savais bien qu'un cœur d'homme battait sous ce double corset de barbelés.

Ne croyez pourtant pas que sa vie en sera soudain simplifiée.
Car parmi les réfugiés ukrainiens, au milieu de la foule des familles éplorées, il y a plein d'étudiants africains, pris dans la tourmente de cette nouvelle guerre européenne.
Et là se pose donc pour lui un vrai drame de conscience.
Est-ce qu'il doit leur offrir du thé à la Maison Communale, comme pour de "vrais" Ukrainiens ? Ou bien les envoyer tout de suite dans un Centre Fermé... "comme les autres" ?

Claude Semal, 10 mars 2022

NB: J'ai l'air de rigoler, comme ça, mais j'ai un immense respect pour ceux et celles qui, depuis plusieurs années maintenant, logent chez eux des migrants, souvent africains, qui ont fui leur pays en guerre ou en famine. Et je ne dispute pas non plus mon respect à tous ceux et toutes celles qui, aujourd'hui, feront la même chose pour les familles ukrainiennes. Simplement, comme le souligne ci-dessous mon copain Denis Laujol, le racisme institutionnel de notre politique d'accueil commence vraiment à se voir comme la narine au milieu du Le Pen. Et ce n'est pas très joli à regarder.

 

Yemen 2021 photo Marie-Aurore Dawans

NOS SOCIÉTÉS, NOS MÉDIAS, NOS GOUVERNEMENTS SONT RACISTES
par Denis Laujol (sur Facebook)

Ce que raconte la disproportion hallucinante entre le mouvement actuel de solidarité avec les réfugié.es ukrainien.nes et le peu de soutien que reçoivent les autres réfugié.es (qu'on appellera plutôt migrant.es, d'ailleurs, vous voyez : ceux et celles qui se noient en Méditerranée, qu'on parque en centres fermés, qu'on poursuit, pourchasse et laisse crever...) est terrible pour nos sociétés occidentales.
Racisme (définition du Larousse): idéologie fondée sur la croyance qu'il existe une hiérarchie entre les groupes humains, autrefois appelés "races". Comportement inspiré par cette idéologie. CQFD.
Nos pays, nos médias, nos gouvernants, nos sociétés, sont racistes.
L'admettre c'est déjà le combattre.
Pourvu que ce qui se passe en ce moment avec l'accueil des Ukrainien.nes ouvre nos yeux sur l'aberration dans laquelle nous vivons depuis si longtemps.
Et que vive la solidarité avec les fragiles, du monde entier.
La photo c'est au Yémen, en novembre 2021, merci Marie-Aurore.

Denis Laujol

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PAS LE COEUR A LA FÊTE

Logiquement, cela aurait dû être la plus grosse teuf de l’année.
Le printemps avant la lettre.
Trois jours de carnaval, d’huîtres dans la bière, de confettis sur les brochettes, partout et sans masque. On aurait fait péter le Cava et le concept. Sorti les tables et les bouteilles dans la rue. Embrassé les voisins. Brûlé les vieux masques et les tests transgéniques usagés en tas sur la chaussée. Dansé jusqu’au bout de la nuit.
Le Bois de la Cambre, puissance dix, mais sans les autopompes.
Et à Liège, le Parc de la Boverie, rebaptisé “de la Beuverie”, aurait été intronisé en dancing permanent.
Vous vous rendez compte ? Enfin, enfin, la délivrance !
La fin du tunnel, après deux ans de peur, de fermetures des cafés, de quarantaines à la chaîne, de confinements généralisés, d’interdiction de danser, d’exclusions des non-vaccinés, de QR code obligatoires, de CODECO permanent, de Covid Safe Ticket dans ton cul et de lois sanitaires édictées sur ordonnance !
Eh! bien non.
Juste une petite fiesta au Théâtre de Poche, style braséro, Chardonnay et bières locales, comme ils en font 185 par an. Quatre étudiantes de l’INSAS qui dansent vaguement devant un bar, ça ne compte pas.

Sacré Poutine. Il devait avoir l’œil fixé sur la courbe des chiffres de Sciensano, ou les “live” du CODECO en boucle dans sa salle de bain, attendant le meilleur moment pour nous pourrir la vie.
Ca y est, les Belges sortent du tunnel ? Tenez, prenez ça dans la gueule ! Et boum !, il envoie ses chars envahir l’Ukraine…
Mais qu’est-ce qu’on lui a fait, à ce Poutine !?
Évidemment, nous, cela nous a un peu coupé le sifflet. On n’est pas des bêtes. Le Belge est un grand sensible.
Notez bien que, malgré notre grande sensibilité, la guerre chez les autres, généralement, on s’en tamponne la barquette de frites. Cela ne nous a jamais empêché de digérer ni de ronfler. Enfin, quand je dis “nous”, c’est une facilité de langage. Car il y a toujours eu aussi, chez nous, quelques solidaires solitaires qui veillaient au chevet des malheurs du monde. Et “gardaient la lampe allumée” (Bertin).
Tant que cela se passait au Yémen, en Syrie, en Érythrée, “nous” arrivions généralement très bien à “vivre avec”. D’ailleurs, nos journaux et nos télés n’en parlaient (pratiquement) jamais.
Comme le disait Jacques Chirac, cela nous en touche une sans faire bouger l’autre (important, le Chirac : un journaliste doit toujours citer ses sources, même discrètement poilues).
Mais l’Ukraine, c’est différent. On se sentirait presque en famille. Car rien ne ressemble plus à un soldat ukrainien que mon plombier polonais.

Tenez, regardez Sammy Mahdi, notre secrétaire d’État à l’Asile, à la Migration (et à la Loterie Nationale, pour bien nous faire comprendre que notre politique d’accueil, c’est d’abord une tombola). Pas un tendre, pourtant.
Le type qui a décidé, une fois pour toutes, de tirer l’échelle derrière son père, pour être sûr que plus personne jamais ne lui piquera la place.
Du genre à aller crever lui-même les dinghys orange à la fourchette en Méditerranée, pour être sûr que les réfugiés n’arrivent jamais à la nage jusqu’au Petit Château à Bruxelles. Eh! bien là, c’est l’inverse.
Les Ukrainiens, il organiserait presque un pont aérien d’autocars pour aller les chercher sur place. Il parait qu’il aurait même été demander conseil aux logeuses du Parc Maximilien.
Serviable, le gars. Gentil. Le sandwich sur la main. Welcome Refugies !
Oui, je savais bien qu’un cœur d’homme battait sous ce double corset de barbelés.

Ne croyez pourtant pas que sa vie en sera soudain simplifiée.
Car parmi les réfugiés ukrainiens, au milieu de la foule des familles éplorées, il y a plein d’étudiants africains, pris dans la tourmente de cette nouvelle guerre européenne.
Et là se pose donc pour lui un vrai drame de conscience.
Est-ce qu’il doit leur offrir du thé à la Maison Communale, comme pour de “vrais” Ukrainiens ? Ou bien les envoyer tout de suite dans un Centre Fermé… “comme les autres” ?

Claude Semal, 10 mars 2022

NB: J’ai l’air de rigoler, comme ça, mais j’ai un immense respect pour ceux et celles qui, depuis plusieurs années maintenant, logent chez eux des migrants, souvent africains, qui ont fui leur pays en guerre ou en famine. Et je ne dispute pas non plus mon respect à tous ceux et toutes celles qui, aujourd’hui, feront la même chose pour les familles ukrainiennes. Simplement, comme le souligne ci-dessous mon copain Denis Laujol, le racisme institutionnel de notre politique d’accueil commence vraiment à se voir comme la narine au milieu du Le Pen. Et ce n’est pas très joli à regarder.

 

Yemen 2021 photo Marie-Aurore Dawans

NOS SOCIÉTÉS, NOS MÉDIAS, NOS GOUVERNEMENTS SONT RACISTES
par Denis Laujol (sur Facebook)

Ce que raconte la disproportion hallucinante entre le mouvement actuel de solidarité avec les réfugié.es ukrainien.nes et le peu de soutien que reçoivent les autres réfugié.es (qu’on appellera plutôt migrant.es, d’ailleurs, vous voyez : ceux et celles qui se noient en Méditerranée, qu’on parque en centres fermés, qu’on poursuit, pourchasse et laisse crever…) est terrible pour nos sociétés occidentales.
Racisme (définition du Larousse): idéologie fondée sur la croyance qu’il existe une hiérarchie entre les groupes humains, autrefois appelés “races”. Comportement inspiré par cette idéologie. CQFD.
Nos pays, nos médias, nos gouvernants, nos sociétés, sont racistes.
L’admettre c’est déjà le combattre.
Pourvu que ce qui se passe en ce moment avec l’accueil des Ukrainien.nes ouvre nos yeux sur l’aberration dans laquelle nous vivons depuis si longtemps.
Et que vive la solidarité avec les fragiles, du monde entier.
La photo c’est au Yémen, en novembre 2021, merci Marie-Aurore.

Denis Laujol

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