
23 septembre 2025
MODESTE CONTRIBUTION À LA PSYCHOLOGIE SOCIALE par Thomas Gunzig
Le billet radiophonique de Thomas Gunzig sur la Palestine à la RTBF a provoqué de nombreuses réactions critiques sur les « rézozozios ». J’ai d’ailleurs repris deux de ces « post » critiques dans l’Asympto, dans la rubrique « C’est vous qui le dites ».
Thomas y a répondu par un texte malin et sincère où il développe un peu plus sa pensée. En gros, ce texte devrait, je crois, « rassurer » un peu ses détracteurs. Mais en généralisant son propos, teinté d’un profond pessimisme, il offre le flan à une autre critique. Et si je peux en partager certaines prémisses de ses réflexions, je n’en partage pas la conclusion. Car affirmer, comme il le fait, que toutes les révolutions seraient, par essence, vaines, et toutes les actuelles catastrophes, fondamentalement inévitables… ne peut, à mon sens, que produire une morale de l’inaction, du cynisme et du je-m’en-foutisme.
Pour ma part, je ne m’y résignerai jamais.
Les « réactionnaires », en ce domaine, ont un avantage certain sur nous : le passé a déjà creusé son chemin, et il leur « suffit » d’une certaine façon d’en prolonger l’ornière. Alors qu’en dégoupillant l’avenir, les « révolutionnaires » ouvrent mille chemins possibles – qui tous ne vont pas dans la même direction. Comment pourraient-ils par magie en emprunter un seul en commun ?
Thomas cite la guerre d’Espagne. Mais mis à part leur haine commune du fascisme, quelle alliance de fond aurait-elle pu se nouer entre les anarchistes et les « conseillistes » de Catalogne, partisans de l’auto-organisation des travailleurs, et l’état dictatorial qu’était devenue l’URSS à la fin des années trente – qui avait tué ou emprisonné 90% des révolutionnaires du Comité Central du PCUS de 1917 ? Ce n’est pas une question de « pureté » ou « d’orthodoxie ». Mais ce sont des choix d’organisation de la société parfois diamétralement différents.
Il ne suffit donc pas de proclamer « la nécessaire unité de la gauche » (ou « des progressistes »). Il faut créer les conditions concrètes de cette unité autour d’un programme et de principes communs.
La situation politique générale semble sans issue ? Il y a toujours, je pense, dans les situations les plus inexpugnables, un chemin des crètes à inventer et à construire – sinon pour nous, du moins pour les générations qui nous succèderont. C’est la seule façon, me semble-t-il, de construire une morale qui soit à la fois de l’action, de la liberté et de la responsabilité. Nous agissons ensemble parce que nous pouvons changer le monde. Et si on peut boire des coups et rigoler en plus en le faisant, c’est tant mieux. Mais entretemps, je vous laisse entre les mains de Thomas Gunzig ;-). (Claude Semal).
MODESTE CONTRIBUTION À LA PSYCHOLOGIE SOCIALE par Thomas Gunzig
Le “billet oui/non », modeste contribution à la psychologie sociale ou pourquoi ce sont toujours les mêmes qui gagnent à la fin.
Il y a donc eu ce billet « oui/non » sur Gaza, Israël et la Palestine et, comme je m’y attendais, il y a eu des réactions.
Ça a été un moment plus intéressant qu’éprouvant pour lequel j’ai eu envie de prendre un peu de temps afin de l’analyser et peut être de le comprendre. J’ai écrit ces quelques réflexions, c’est long, ce sera donc assez peu lu ou partagé, mais cela n’a pas d’importance, il s’agissait pour moi d’éclaircir mes propres idées en les mettant par écrit.
Avant tout, il faut préciser une chose, je ne tiens pas particulièrement à ces billets que je fais une fois par semaine. Ce n’est pas mon vrai métier et je n’en dépends heureusement pas pour vivre (un billet équivaut à un plein d’essence dans une petite Aygo, modèle 2001, réservoir de 30 litres). Pourquoi y mettre autant d’énergie, alors ? Aucune idée. Peut-être parce que j’aime la petite émotion naissant du direct, peut-être parce qu’au fond, j’aime le lien que cela crée avec les auditeurs. Ce sont des choses toutes simples de cet ordre.
Revenons au billet « oui/non » auquel, aujourd’hui, je ne changerais pas une ligne. Il suscita beaucoup, beaucoup, de réactions positives, parfois en public, parfois en privé, parfois venant de personnalités que j’aime, parfois venant de personnalités totalement inattendues.
Et puis aussi, il y eut beaucoup, beaucoup, de réactions négatives, toujours en public, celles-là. Ce n’est pas spécialement traumatisant, en réalité, dès qu’on prend la parole dans un espace médiatique, c’est ce qui se passe aujourd’hui.
Cela se passe comme ça quand vous parlez de la culture des radis et, forcément, cela se passe comme ça lorsqu’il s’agit d’un sujet aussi sensible que celui du Proche-Orient.
Est-ce que c’est agréable ? Non.
Est-ce que c’est attendu ? Oui.
Est-ce que c’est souhaitable ? Je ne sais pas.
Il est une chose sur laquelle tout le monde sera d’accord, le monde va plutôt mal. La démocratie qui a toujours été en crise semble vivre ses dernières heures, l’Europe affaiblie est coincée entre des États-Unis en marche vers une autocratie réactionnaire et une Russie qui se rêve impériale. À l’intérieur de leurs frontières, les pays sont secoués par des pulsions xénophobes et illibérales que rien ne semble pouvoir arrêter.
Le fond de ma pensée c’est que c’est fichu. Le climat ne sera jamais sauvé, les inégalités vont se creuser jusqu’à l’absurde et, au Moyen-Orient, Israël exterminera ou chassera les Gazaouis. À terme, il occupera l’entièreté de la Cisjordanie, le business plan de la « riviera » est déjà conclu. C’est comme ça que ça va se passer. On aura beau manifester, lancer des cailloux, casser des trucs, hurler, mettre des autocollants sur sa voiture, suspendre des drapeaux à ses fenêtres, ça ne servira à rien. Tout est perdu.
Tout est perdu d’abord parce « les autres » sont très forts. Ils ont l’argent, ils ont le pouvoir, ils ont les armes, ils ont les outils numériques et les algorithmes qui vont avec. Mais si tout est perdu, c’est surtout parce que ceux et celles qui voudraient la révolution sont désespérément incapables de s’organiser, d’unir leurs forces et de parvenir à identifier où se trouve la vraie menace.
Il y a ce mystère : pourquoi toutes les révolutions (ou presque) ont-elles échoué ? Pourquoi ont-elles été interrompues par la répression ou bien se sont-elles transformées, après un bain de sang, en un nouveau système aussi injuste que celui qu’elles voulaient remplacer ?
Je regarde vers le passé : la Révolution française a dégénéré en Terreur. Les divisions internes entre factions ont mené à des purges, on s’accusait mutuellement « d’impureté idéologique ». Qui devait-on considérer comme un vrai révolutionnaire ? On ne savait plus trop. Et voilà que, au lieu de se concentrer sur la défense externe et les réformes, on se déchire sur des questions de loyauté idéologique.
L’historien Hippolyte Taine (qualifiez-le de réac si vous voulez, ce serait un peu con, c’était au XIXe) a eu une phrase que j’aime bien (je la sors de son contexte comme un vrai salaud, mais elle résonne jusqu’à aujourd’hui) : «Rien de plus dangereux qu’une idée générale dans des cerveaux étroits et vides : comme ils sont vides, elle n’y rencontre aucun savoir qui lui fasse obstacle ; comme ils sont étroits, elle ne tarde pas à les occuper tout entiers. »
Pendant la guerre d’Espagne, au lieu de s’unir contre Franco, voilà que les forces républicaines se déchirent entre socialistes, communistes, anarchistes et les marxistes antistaliniens (il faut lire « Pour qui sonne le glas » de Hemingway, il y fait un joli portrait d’un chef communiste doctrinaire, Aragon ne le lui a jamais pardonné, on ne touche pas au communisme). Qui est un vrai révolutionnaire ? Le stalinien ? Le trotskyste ? L’anarchiste ? Là encore, des purges internes ont affaibli l’unité et conduit à la défaite.
En mai 68, l’histoire se répète encore. Les tentatives de révolution ne débouchent sur rien. Tout le monde rejette le capitalisme (et le gaullisme), mais voilà que le mouvement s’éparpille dans d’interminables affrontements internes et entre les étudiants d’un côté, les syndicats de l’autre (qui les trouvaient « petit bourgeois »).
Cette « spirale de pureté » est la malédiction des mouvements révolutionnaires ou des milieux militants. Il s’agit de cette escalade bizarre, ridicule et stérile dans laquelle les membres du mouvement rivalisent entre eux pour démontrer une adhésion de plus en plus extrême à leur idéologie. Si, en chimie, il existe une définition claire de la pureté, en matière politique non, il n’y a pas de limite supérieure. De cette manière, la surenchère morale peut être infinie. Il y a alors une espèce de compétition pour savoir qui montera le plus haut sur la haute échelle de l’orthodoxie, une dynamique grotesque dans laquelle les opinions les plus radicales sont récompensées, admirées, suivies (plus de partages, plus de like, plus « d’engagement », comme dit le langage des réseaux sociaux) tandis que les nuances et les débats sont écartés dans une grande fiesta sanguinaire de frénésie morale. C’est l’escalade idéologique, la quête de la conformité absolue.
Le scénario est alors classique, celui des purges internes, celui où l’on s’éloigne progressivement des buts originaux. La réalité n’a plus d’importance, seul compte un idéal de pureté fantasmé au nom duquel tout est permis.
C’est le moment de l’orthodoxie et pour la Révolution, c’est la fin. C’est le moment où elle ne s’intéressera à plus rien d’autre qu’elle-même. L’orthodoxie se détourne de la complexité et donc de l’humain. Elle ne tolère que ce qui lui ressemble radicalement.
L’orthodoxie est parfaitement sûre de son fait. Et c’est bien ce qui la rend dangereuse. C’est toujours l’orthodoxie qui tue et elle peut le faire parce qu’elle estime qu’elle en a le droit, qu’en tuant, elle œuvre pour le bien. Le sniper israélien tuant un civil palestinien pense faire quelque chose de bien, le militant du Hamas égorgeant un israélien pense faire le bien, un militaire argentin jetant un homme à la mer depuis un hélicoptère, un officier nazi gazant des juifs, le hutu passant un tutsi à la machette… Tous pensent très sincèrement œuvrer pour le bien. Jamais un esprit rempli de doute, cherchant à comprendre, demandant qu’on lui explique une deuxième fois, n’a tué qui que ce soit.
Si l’orthodoxie déteste tout ce qui est différent d’elle, ce qu’elle hait le plus au monde, c’est bien la réflexion. Et le drame, évidemment c’est que la réflexion sera toujours perdante. La réflexion c’est un livre à lire, l’orthodoxie c’est un slogan. La réflexion demande du temps, de la maturation exige de remettre en cause ses certitudes, l’orthodoxie est immédiate, sexy, simple, énergique. Elle est instantanément valorisée. On like plus volontiers la formule que le développement. Enfin, comme l’orthodoxie voit dans la réflexion son ennemie, elle va tenter de la disqualifier en l’accusant de « faire le jeu » de l’ennemi, voire d’être son complice. Les techniques de disqualification sont toujours plus ou moins les mêmes : on interrompt, on ridiculise, on insulte, on déforme, on sous-entend, et, bien entendu, on menace.
Les réactions négatives à mon billet ont toutes rassemblé ces caractéristiques. Il y eut bien entendu, derrière les émoji nausée ou vomi, le geste classique du virtue signaling, cet acte consistant à afficher en public ses valeurs morales (ou supposées telles) afin d’améliorer son image sociale sans qu’il y ait forcément, derrière l’émoji, de convictions profondes. Il y a eu la dévalorisation par le mépris en soulignant mon « inculture », il y eut l’accusation d’être un « collabo » parce que mon texte serait d’une « neutralité qui ferait le jeu» (la citation Desmond Tutu revint pas mal de fois comme un mantra). Il y eut des critiques plus floues, en creux, de personnes déclarant s’être senties « mal à l’aise » non par ce que je disais, mais par ce que je ne disais pas, ce qui, selon elles, constituait un parti pris condamnable. Il y eut des réactions plus modernes en mode « instagrammeur » avec du décorticage face caméra expliquant pourquoi tel mot, tel terme, telle question n’était pas à sa place et pourquoi, dès lors, ce billet était mauvais. Dans un total abandon de la pensée, certains allèrent jusqu’à faire analyser le texte par ChatGPT pour faire démontrer par l’IA qu’il était « dangereux ». Très symptomatique aussi de cette tendance dans laquelle l’opinion précède la réflexion, il y eut cette personne qui vint me dire que la neutralité qu’elle avait cru percevoir dans le billet était scandaleuse tout en déclarant, avec fierté, qu’elle ne l’écouterait pas parce que ce « qu’on lui en avait dit lui suffisait”. Il y eut aussi du recadrage idéologique en bonne et due forme avec un texte à charge lu, keffieh sur les épaules sur fond de musique dramatique.
Souvent aussi, on utilisa (sans le savoir) le stratagème 32 de l’art d’avoir toujours raison de Schopenhauer : « le principe de l’association dégradante », faisant de moi un salaud parce que je parlais de complexité alors que des « enfants meurent sous les bombes » (j’ai mis des guillemets parce que c’est de cette manière que ce fut formulé).
Bien entendu, il y eu toutes sortes d’insultes (« pourriture sioniste ») et de menaces, parfois floues (« on ne t’oubliera pas ») parfois rigolotes (« t’es bon pour la CPI »).
Il y eut aussi la condamnation par raccourcis : ce billet est mauvais parce que «Gunzig travaille pour une radio de collabo (la RTBF) » ou parce que « il a signé une carte blanche avec untel » (nom d’une personnalité ayant tenu des propos franchement révisionnistes sur Gaza). Un message affirma qu’il y avait « conflit d’intérêts » parce que « Gunzig est Israélien » (je n’ai osé y voir une distorsion de la perception déduisant de la judéité de mon père belge mon hypothétique nationalité israélienne).
On utilisa aussi, en guise de disqualification, le terme « bourgeois » dont on sait qu’il ne signifie pas grand-chose et qu’il est, de ce fait, bien utile pour se débarrasser de quelqu’un (durant la grande terreur de la dékoulakisation, vous étiez un bourgeois bon pour la Sibérie si vous possédiez une chèvre). Il y eut, enfin, l’utilisation du terme « problématique » que l’on retrouve souvent dans d’autres débats. Un terme assez crapuleux dans la manière qu’il a d’être à la fois vague (il suggère) et définitif (il condamne).
Il est un point intéressant, c’est que, sur l’essentiel, j’étais et je suis toujours d’accord avec tous ceux dont émanaient ces commentaires : Israël commet des crimes de guerre, il y a un génocide en cours, il faut des sanctions contre Israël, il faut un état palestinien. Affirmer cela, lorsqu’on connait l’importance de ces questions et des réponses qu’on peut leur apporter, ne ressemble pas vraiment à de la neutralité. Mais si, sur l’essentiel et le plus important, nous étions d’accord, c’est donc le reste qui me valut la shitstorm.
Dans mon texte, certaines réponses, l’absence de certaines questions, la manière de présenter tel ou tel point ont déplu à une partie du monde militant qui s’est déchainé dans ce qui ressemblait à une ivresse messianique, avec la rage des gardiens du temple à l’égard de quelqu’un qui serait rentré chez eux sans s’essuyer les pieds.
Cela m’a rappelé une soirée passée, il y a quelques années, à l’invitation d’une association belgo-palestinienne (j’ai oublié son nom, mea-culpa). J’étais parti en Cisjordanie en compagnie d’un écrivain et d’un cinéaste, il s’agissait de nous faire rencontrer des écrivains, des artistes et des intellectuels palestiniens. Au terme de ce voyage, j’avais écrit un texte que j’avais lu à l’occasion de cette soirée, un texte joyeux dans lequel je parlais de la beauté du pays, des fêtes que nous y avions faites, de ce que nous avions bu et mangé en compagnie de ceux que nous avions rencontrés. Dans l’assistance, composée de militants belges, ce fut la stupéfaction et la colère. Mon texte ne parlait pas assez de la souffrance, de la violence de l’occupation ou de la menace des colonies. En fin de soirée, Leïla Shahid qui était présente, était venue vers moi et m’avait dit « c’est de ça qu’il faut parler, de cette joie qui existe là-bas ».
Bien entendu, c’était une autre époque. Le désespoir y était moins absolu, la violence n’avait pas encore atteint le niveau d’apocalypse que nous connaissons aujourd’hui, mais cet exemple illustre à merveille la raideur idéologique dont peuvent faire preuve ceux qui s’emparent d’une cause dont ils estiment être les uniques propriétaires.
Et pendant que tous ceux qui voudraient que les bombes cessent de tomber se chamaillent, s’épuisent sur des éléments de langage, sur des divergences de vues, sur la manière de qualifier les choses, sur l’importance de tel ou tel repère historique, hé bien… les bombes ne cessent de tomber et ceux qui les lancent doivent être ravis du spectacle que nous leur donnons. Quand le génocide a-t-il commencé ? Est-ce un état colonial ? Comment le définir exactement ? À combien de pourcent Israël est-il responsable ? Et la formule « from the river to the sea », bien ou mal ? Et les artistes israéliens, boycott ou non ? Voilà de quoi nous discutons pendant qu’avec détermination, avec régularité, Trump, Poutine, Netanyahou qui n’en ont absolument rien à faire de ces cheveux coupés en quatre, règlent le problème à leur façon.
Parce qu’en face de la dynamique progressiste, il y a la dynamique réactionnaire. Et cette dynamique-là est dotée d’un tube digestif beaucoup plus solide que celui de la gauche (au sens large). Cette dynamique-là est capable d’agréger dans son ventre à peu près n’importe quoi, du raciste de base à l’incel, du catho tradi au néo nazi, de l’antivax au pro-russe, du juif millénariste à l’islamophobe, du climatosceptique au chef d’entreprise qui se dit que ce sera bon pour ses affaires.
Il y a cet exemple que j’aime beaucoup et il me servira de conclusion, celui de la rupture entre Antonin Artaud et André Breton. André Breton était pointilleux et doctrinaire. Il voulait avancer dans son projet de « révolution surréaliste ». Antonin Artaud avait quitté l’affaire sachant que, si l’humain ne commençait pas par faire sa révolution intérieure, il n’y aurait pas de révolution du tout.
La Révolution surréaliste n’eut jamais lieu.
Et de son côté Artaud est mort seul et fou.
Signe probable qu’il avait raison.
Thomas Gunzig (sur FB)
Photo du haut : des membres des Brigades Internationales, Espagne 1936.
No Comments