JULOS MON CAMARADE par Bernard Gillain

Julos, c’est mon camarade de toujours, c’est mon Amérique à moi, je dirais même plus c’est ma Francophonie à moi. Avec lui j’ai fait les 400 coups à la radio. Comme deux laboureurs, nous avons creusé nos sillons en Wallonie et même un peu plus loin jusqu’au Québec. Il écrivait des textes et chantait ses chansons que nous reprenions tous les deux à l’unisson, une trappiste catholique à la main.
Julos, toujours à la proue de notre vaisseau spatial terre, nous rappelle inlassablement que tout un chacun doit lancer sa bouteille à la mer avec message pour sauvegarder notre planète…
‘Réparons tous notre vaisseau Nous n’en avons qu’un, il est beau…’
Face à la menace de degré 1,2,3 ou 4, nous nous sentons démunis.
Face à ces peurs, la poésie vient à la rescousse. Comme ces quelques vers de Jean Ferrat qui résonnent comme une évidence salvatrice :
‘Le poète a toujours raison Qui voit plus haut que l’horizon Et le futur est son royaume…’
Le ‘Petit Royaume’ de mon ami, c’est chez moi, c’est chez vous. ‘Même si notre histoire paraît dérisoire dans le temps qui fuit. Même si elle est vaine cette course humaine vers quoi et vers qui?
Le petit royaume sans majordome chez lui…’
Que faire dans ce monde de brutes, sinon croire à ce petit royaume, y croire à tort et à travers. Et comme disait l’autre, l’autre qui n’est autre que mon frère, mon ami, mon camarade…
‘Je chante pour vous, pour faire un point d’orgue, Arrêter le temps, suspendre son vol, Même si partout tout n’est que désordre Tenter conjurer, conjurer le sort…’
Comment conjurer le sort d’ici-bas et joindre les deux bouts, comment allier solitude et solidarité pour, un jour, pouvoir débarquer sur l’île de la Désirade, la si bien nommée. Eh bien c’est simple, nous répète Julos : ‘Il nous faut pagayer sans cesse à contre-courant car, comme dit le proverbe africain, ‘Qui pagaye quand le courant le porte fait rire les crocodiles !’. Il n’y a pas d’alternatives, il nous faut pagayer à contre-courant des jours, des jours qui ressemblent de plus en plus à des nuits.
Heureusement, de jour comme de nuit, Julos, notre phare textuel, notre veilleur, n‘arrête pas de scribouiller des papiers et de babeler des ritournelles pour colorer nos vies aux couleurs d’arc-en-ciel.
Quant à moi, je continue à suivre la partition de mon ami et ce depuis mes 20 ans, et j’ai 20 ans depuis bien plus de quarante ans. Au vu du monde comme il tourne, il m’est parfois difficile de croire encore et toujours à une terre où couleraient le lait et le miel.
Alors en désespoir de cause, je me lève avec le soleil, je pousse mon cocorico matinal, accompagné de ma guitare, pour me donner du courage et essayer de rayonner chaque jour que Dieu fait, avec ou sans mon vélo, mais surtout avec mon vélo.
Et si Dieu était la Poésie et si Julos et tous les poètes du monde étaient comme les apôtres d’un évangile à réinventer, histoire de sortir des chapelles de toutes sortes pour qu’il n’y ait qu’une seule cathédrale à voiles qui aurait comme clé de voûte le ciel où chaque étoile serait là pour nous rappeler les poètes disparus mais toujours présents. C’est ça la poésie, ce sont des phares qui nous éclairent en permanence et nous invitent à soulever nos carcasses.
Julos est de ceux-là. Il laboure les mots à longueur de jour. Toujours à la proue de notre vaisseau spatial terre et toujours la tête dans les étoiles avec ses deux grosses bottines bien ancrées dans la terre d’Ecaussines et de la planète toute entière.
Beaucarne est, comme disait Léo Ferré, d’un autre pays que le nôtre et en même temps il est des nôtres.
Julos, c’est un ciseleur de paix, un doux planeur en quête de silence.
Beaucarne, c’est ‘Icare’ version ‘hélioplane’. Sous sa houlette, il est pratiquement impossible de se brûler les ailes, car le soleil est son ami. Julos est solaire comme l’avion du même nom. Il transporte à son bord des bombes à fragmentations bourrées de graines de tendresses et d’amour.
Merci pour tout camarade Julos

Bernard Gillain

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