
23 mai 2025
MA SEMAINE DIFFICILE EN DÉFENSE par Bernadette Schaeck
Ducarme, président de la Commission des affaires sociales, fier de donner une interview à un torchon d’extrême-droite (ndlr : “Valeurs Actuelles”, que certains ont rebaptisé “Voleurs Actuels”).
Il y clame sa “rupture franche avec le socialisme“. Ça donne un certain éclairage à sa hargne et sa haine dans les débats en Commission des affaires sociales sur le CPAS d’Anderlecht… C’est la peau du PS qu’il veut, et il ne se fait aucun souci pour toutes les personnes qui n’accèdent pas à leurs droits. Encore une fois bravo aux AS (Assistants Sociaux) qui “passent presque toutes leurs soirées” avec ce sinistre personnage (dixit Ducarme lui-même).
Je copie un commentaire de Michel Henrion : “Pour Sleeping Giants (opposants à l’extrême-droite dans les médias français), les articles de Valeurs Actuelles reprennent «telles quelles la rhétorique, les théories complotistes, l’intolérance et l’accumulation de faits divers orientés que nous n’avions rencontrés que sur les pires blogs extrémistes », concluant que « beaucoup de ses titres ou articles n’ont rien à envier à Boulevard Voltaire ou Minute“.
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Défendre ses droits quand on est pauvre, comme c’est “facile” !
L’une n’a plus de téléphone. Entrée et sortie coupées faute d’avoir pu payer l’abonnement mensuel.
Elle a 3 enfants à charge et n’a pas perçu le RI (revenu d’insertion) depuis mars. Heureusement, je peux encore communiquer avec elle par mail. Mais quand ce sont des situations compliquées, c’est compliqué de devoir tout faire par mail !
L’autre n’a pas perçu le RI depuis début février. Il sait encore recevoir les communications, mais ne sait plus en donner.
Il parvient, difficilement, à trouver à communiquer par mail.
Elle n’a pas perçu le RI depuis plusieurs mois. Elle a demandé un rendez-vous au BAJ, Bureau d’aide juridique, pour la désignation d’un avocat pro deo (enfin, ça ne s’appelle plus comme ça, mais tout le monde sait ce que c’est…).
Un rendez-vous lui est fixé dans 5 semaines. A noter que le délai de recours en appel est d’un mois…
Quelques exemples parmi tant d’autres. Ajoutez à cela la misère de la défense juridique gratuite.
Les avocats “pro deo” viennent de percevoir 60% de ce que leur doit l’Etat. Les 40% restants pourront attendre.
Déjà que leurs honoraires sont rikiki et leur sont versés avec au moins un an de retard.
Il devient dès lors de plus en difficile, dans certaines régions, de trouver un avocat qui veut bien défendre en pro deo.
Qui s’en étonnera ? A part ça, toutes les institutions et le gouvernement déclarent accorder la priorité à la lutte contre le non recours aux droits. Et on ne compte plus le nombre d’études qui ont été réalisées à ce sujet.
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Du chômage au CPAS : la bonne affaire ? C’est le titre d’un article de L’Avenir du 16 mai.
Suite de l’article : « La limitation dans le temps des allocations de chômage pourrait s’accompagner d’un effet d’aubaine pour certaines personnes exclues de ce régime. » Et pour être certain qu’on ait bien compris, la légende sous la photo indique que : « Dans certains cas, le RIS peut apparaître plus avantageux que des allocations de chômage. »
S’appuyant sur les déclarations de Philippe Defeyt qui donne l’exemple d’un chômeur qui a travaillé pendant 6 mois sur l’année et qui devra payer des impôts, alors que le bénéficiaire du RI n’en paie pas, l’article indique que le bénéfice pour celui qui perçoit un RI est de 1.361,96 par an.
J’ignore si la comparaison entre un chômeur qui a travaillé pendant 6 mois, avec un bénéficiaire du RI qui lui aussi aurait travaillé pendant 6 mois, donne le même différentiel. Qui qu’il en soit, quel intérêt à mettre en avant ces exemples de quelques-uns pour lesquels ce serait un « effet d’aubaine » de passer du chômage au CPAS ?
À minimiser l’ampleur du désastre annoncé ? À semer le doute sur les déclarations de ceux qui annoncent cette catastrophe sociale ? Même si quelques chômeurs exclus percevraient quelques euros de plus au CPAS, ou quelques « avantages » de plus (comme le tarif social), il y en a un nombre écrasant qui percevront moins, souvent beaucoup moins, et souvent même rien du tout !
Passer individuellement du régime de la sécurité sociale à celui de l’aide sociale n’est jamais une bonne chose, même pour le petit nombre de personnes qui auraient quelques euros de plus. Qu’un grand nombre de personnes passent collectivement du régime de la sécurité sociale à celui de l’aide sociale, c’est le démantèlement d’une partie importante de la sécurité sociale. C’est cela l’enjeu. Quant à la « belle vie au CPAS », elle n’est déjà pas très enviable maintenant. Mais avec les restrictions prévues dans l’accord de gouvernement, dont les grandes lignes sont fixées mais qui doivent encore être concrétisées, elle le sera encore moins. Pour les chômeurs en fin de droit comme pour tous les autres bénéficiaires.
L’article de L’Avenir a beau se terminer en disant que le nombre de personnes auxquelles le passage du chômage au CPAS pourrait bénéficier financièrement devrait être limité, le titre, même avec un point d’interrogation, fait plus que brouiller les pistes…
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Tellement révélateur ! Il me fait un petit compte-rendu de son audition devant le Comité spécial du service social.
“Mr le Juge, en face de moi“, hoche de la tête quand je parle, me dit-il. La dame à sa gauche pose des questions.
Celle à sa droite aussi. Tous les autres se taisent.
“Mr le Juge“, c’est soit le président du CPAS, soit le président du Comité spécial du service social.
Comme c’est un petit CPAS, c’est certainement le président du CPAS. La dame à sa gauche, et la dame à sa droite, ça peut être soit deux conseillères, soit des responsables du service social. Il a en tout cas eu le sentiment – et ce n’est pas rare ! – d’être face à un Tribunal. Et avec certitude, il ignore totalement qui sont les personnes qui étaient en face de lui et qui décideront de son droit à un revenu d’intégration . Se présenter, lors d’une audition par le Comité spécial ou le Conseil, ce serait élémentaire, non ? Quasiment AUCUN CPAS ne le fait.
Les Conseillers présents, qui prendront la décision suite à l’audition, sont pourtant des mandataires politiques. Il serait intéressant de savoir qui pose les questions qui tendent à permettre à la personne de se défendre, et qui pose les questions qui tendent à la mettre en difficulté. Ce serait intéressant de savoir qui pose des jugements de valeur d’un niveau parfois ahurissant… Je préconise de placer devant chaque participant au Comité spécial une petite pancarte avec nom, prénom, appartenance politique ou fonction à l’intérieur du CPAS.
Petite réflexion d’un vendredi soit après deux semaines particulièrement chargées en défenses individuelles particulièrement difficiles.
Bernadette Schaeck, de l’Association de Défense des Allocataires Sociaux
http://www.adasasbl.be
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