AFFAMER POUR “MOTIVER” … ! par Bernadette Schaeck

2, 3, 4 mois de délai pour obtenir une décision du CPAS !
C’est ce que nous constatons dans certain(s) gros CPAS de la Région bruxelloise.
“AS” (assistants sociaux, qui sont souvent d’ailleurs des assistantes sociales) débordé·es, surcharge de travail, difficultés pour recruter des “AS”, taux énorme d’absence pour maladie, non-remplacement des malades, travailleurs en sous effectif, “crises” qui se succèdent …
OK, mais qui va prendre les mesures qui s’imposent pour résoudre ces problèmes ?
Le RI (revenu d’insertion) est un droit, point barre.
Les délais d’examen des demandes sont déjà longs pour les personnes qui sont en difficulté.
Alors quand ils ne sont plus du tout respectés…
Une femme seule avec quatre enfants, prolongation pas encore faite pour le RI de décembre…
Un couple avec enfant, demande introduite au mois d’août, toujours pas de décision, et pas de paiement, bien sûr…
Une demande d’intervention dans des frais médicaux, en attente depuis cinq mois…
C’est le menu du jour, ou de la matinée en tout cas. Après-midi, on verra.
Ca fait au moins 20 ans qu’on parle du sous-financement des CPAS.
La situation ne fait que s’aggraver. Il est donc clair que des mesures doivent être prises. Des décisions politiques !
Ne jamais se résoudre au fait que les CPAS soient dans les difficultés pour justifier que des personnes et familles manquent de tout, et n’obtiennent pas leurs droits.

Mootivééées, nous sommes moootivéées (air connu).

Avec un peu de motivation, on arrive à tout. Non ?

Se faire exclure du RI (Revenu d’Insertion) pour « trouver la motivation » !
« Trouver la motivation » pour trouver un emploi !
Quand un.e bénéficiaire du RI travaille, ses revenus professionnels ne sont pas entièrement décomptés du montant du RI.
Il ou elle garde pendant trois ans maximum, un « bénéfice » de 291 € par mois.
De nouvelles mesures sont d’application à partir du 1er janvier 2023 (globalement positives même si elles ne rencontrent que très partiellement nos revendications de longue date).
Une circulaire les explique avec moult détails et calculs (1).
De nombreux exemples sont donnés, qui tous ne comportent que des données objectives (Mr A. commence à travailler le 16/12 ; Mme B. perçoit un salaire de 560 € ; Mr C. travaille en intérim du 12 au 30/01…)
Sauf un :
« Madame Q. ne travaille pas et vit seule avec ses 2 enfants. Elle a bénéficié d’un revenu d’intégration en janvier et en février mais celui-ci lui a été retiré dès le 1er mars pour non-respect de la condition de disposition au travail. Madame Q. trouve finalement la motivation de réaliser ses recherches d’emploi et commence à travailler à temps partiel dans le cadre d’un contrat à durée indéterminée à partir du 23 mars. »
Mme Q. a donc « trouvé finalement la motivation » de fournir des recherches d’emploi parce que le CPAS lui a retiré tout revenu, alors qu’elle a deux enfants à charge. Et, oh miracle ! En 23 jours de “recherche d’emploi” que son absence de revenus l’a “motivée” à enfin réaliser, elle en a trouvé !
Ou comment l’Etat social actif s’invite au détour d’une circulaire bourrée de détails techniques, comme ça, sans en avoir l’air…
De la vertu des sanctions infligées aux “fainéants” pour les “motiver “…

Bernadette Schaeck
(Association de Défense des Allocataires Sociaux)

(1) Circulaire du 7/10/2022 – Les revenus professionnels – Point 5.3.3.3.2

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