AU COMPTOIR DES AMIS DE MARC

Le sociologue liégeois Marc Jacquemain, l’asymptomatique Irène Kaufer, et votre scribouillard serviteur, avons milité et travaillé ensemble, il y a deux ou trois mille ans, au sein de l’hebdomadaire “POUR” (1973-1981) et de l’organisation “Pour Le Socialisme”. Oui, je sais, cela commence à ressembler furieusement à un épisode des “Vieux Fourneaux” (dans les quels, parait-il, on fait les meilleures soupes, mais je commence peut-être à me mélanger les légumes) (1).

Quand une grave crise interne a fait exploser la rédaction, nous nous sommes retrouvés du même côté du conflit, et si nous n’étions pas d’accord sur tout, nous en avons au moins tiré une certaine estime réciproque que les quarante années suivantes n’allaient jamais vraiment démentir. Nous avons eu des vies fort différentes, mais qui témoignent toutes trois d’un certain sens de l’engagement, de la solidarité et de la démocratie.
Dans un “post” récent sur sa page Facebook, Marc vient d’initier un débat sur les possibles contradictions entre la notion de “liberté individuelle” et celle de “responsabilité collective”.
Je ne suis pas sûr de le suivre totalement dans cette voie (car la plupart de nos “libertés individuelles” ne sont jamais que des déclinaisons de nos “libertés collectives”), mais je comprends ce sur quoi il a voulu mettre le doigt.
Et ce qui m’a frappé ensuite, c’est la “qualité” des échanges qui ont suivi sa publication.
Facebook a souvent la réputation d’être le nouveau “café du commerce”, au comptoir duquel nous nous contenterions d’échanger de banaux et stériles commentaires – quand on ne se répand pas en injures au bout de dix ou vingt secondes.
Ici, au moins, me semble-t-il, on a tenté d’échanger des arguments.
La compilation de ces plaidoiries contradictoires ne dégage évidemment pas “une vérité”, mais c’est une assez bonne photographie des différents discours qui balisent la drôle de période que nous traversons ensemble.

C’est à ce titre que je la soumets à votre propre réflexion.

Claude Semal le 3 décembre 2021

(1) Roborative série BD de Lupano et Cauuet mettant en scène trois septuagénaires loufoques au passé militant.

 

 

ANTIVAX OU ENFANTS GÂTÉS ? (par Marc Jacquemain)

La méfiance à l’égard des vaccins, dans une certaine mesure, n’a rien d’irrationnel en soi. Dans leur livre « Antivax », qui retrace l’histoire des oppositions à la pratique depuis avant Pasteur, Françoise Salvadori et Laurent-Henri Vignaud montrent que l’anti-vaccinisme a parfois été défendu au nom de la science et concluent que « les controverses vaccinales, qu’elles portent sur la sécurité, l’efficacité ou l’obligation légale, sont sources de conflits culturels et individuels qui en font des lieux d’exercice d’une démocratie active et vivante… ». Je suis prêt, bien que moi-même très heureux d’être vacciné, à soutenir ce point de vue.
La méfiance à l’égard des politiques sanitaires menées dans tous les pays du monde n’est pas non plus absurde : on a le sentiment que nos gouvernements naviguent à vue et n’arrivent ni à prendre des décisions claires (pensons aux premiers discours sur les masques) ni à prendre le dessus sur la logique marchande des firmes pharmaceutiques.
En revanche le discours qui refuse toute mesure contraignante de protection au nom de la « liberté » tient, lui, d’une autre logique : c’est le résultat de trois quarts de siècle de propagande en faveur de l’individualisme « possessif », cette idée que toute restriction de nos désirs individuels est forcément une dictature.
Cette propagande prend dans nos « démocraties » (bien relatives parfois) la forme de la publicité commerciale et résume les débats de société à un « univers d’opportunités » – pour ceux qui en ont les moyens et seulement eux. Elle se résume à « vivez comme vous voulez » et glisse sous le tapis tous les coûts collectifs de cette irresponsabilité.
Celui qui dit avoir peur du vaccin mais qui se précipite pour le prendre parce que sinon, il pourrait être privé de Marbella ou de boîtes de nuit, celui qui ne veut ni du CST ni du masque, celui qui confond la liberté avec le désintérêt pour tout projet collectif, ou toute exigence de protection mutuelle, celui-là n’est pas un antivax. C’est juste un enfant gâté et un « gosse de riche ».

Marc Jacquemain (le 22 novembre sur Facebook)

(Réponse de Leyon L.)

Réflexion intéressante mais cantonnée dans un champ bien délimité : le vaccin. Il se trouve que la substance dont il est question de contraindre l’inoculation n’a que peu de rapport avec un véritable vaccin au sens Pasteurien du terme. Juridiquement, elle reste expérimentale aux termes d’AMM (Autorisation de Mise sur le Marché) conditionnelles et temporaires. Donc il est interdit et illégal d’en forcer l’injection, même assortie de consentements du reste très forcés. Une preuve de son aspect expérimental est très aisée à produire: je me souviens de scientifiques de plateaux patentés affirmer que 70% de monodosés nous sortiraient d’une catastrophe sanitaire qui cause 0,4% de létalité et 0,012% de mortalité. Nous en sommes actuellement à 85% de bidosés et les tridosés sont en route. Et les contaminations explosent. Dans un contexte où les fabricants refusent contractuellement la responsabilité d’effets indésirables, il y a toutes les raisons de douter de la démarche sanitaire d’industriels exclusivement orientés sur le profit jusqu’à falsifier les données scientifiques, frauder le fisc (nous) et produire des lois clés en main pour assouvir leur cupidité. Leur passé est d’ailleurs illustré par de nombreux scandales. Leurs victimes ne sont parfois plus en vie pour en témoigner.

(Réponse de Philippe L.)

Veux-tu dire que le(s) vaccin(s) COVID sont inoffensifs ? Si oui, ça risque d’être une première, un médicament efficace mais inoffensif. Si non, ça veut dire que sa prescription doit être le résultat d’un examen de la balance risque/bénéfice.
Le bénéfice se mesure par rapport à un objectif.
Dans ce cas on peut envisager 3 objectifs :
1. Mettre fin à l’épidémie en enrayant la transmission du virus. Cet objectif n’a pas été vérifié lors des essais cliniques, et n’est pas réalisé puisqu’on constate que la circulation du virus n’est pas moins rapide là où les taux de vaccination sont supérieurs (p.ex. en Flandres par rapport à la Wallonie ou Bruxelles).
C’est d’ailleurs cohérent avec ce qui est dit depuis le début de la crise des malades asymptomatiques (mes excuses pour l’oxymore).
2. Désengorger les hôpitaux : l’objectif est atteint, mais ça risque de ne pas être pour longtemps si le personnel soignant se met en grève (ou si encore plus de soignants changent de métier). La vaccination des soignants n’impacte pas le risque d’infecter les patients, mais bien le taux d’absentéisme du personnel.
3. Réduire le risque individuel de développer des symptômes sévères suite à une infection par le SARS-COV2 : la seule hypothèse qui a été testée lors des essais cliniques, et là on peut déduire de la chute de la létalité une efficacité certaine, qui ne semble pas encore battue en brèche par l’apparition de coronavirus mutants.
La question qui reste, dès lors, c’est de savoir si le risque de la forme sévère de la maladie est identique pour toute la population, et si on peut identifier avec suffisamment de précision les groupes pour lesquels le risque de la maladie est supérieur à celui du médicament. Et ce, quel que soit le médicament.
Pour le “COVID Safe Ticket” (CST), c’est plus simple : on peut être infecté et contagieux en étant vacciné, donc le CST est en fait un permis de contaminer. Mais même nos ministres ont admis que ce document ne vise pas à protéger qui que ce soit mais à rendre la vie impossible aux personnes dont le risque COVID est inférieur au risque Médicament…

(Réponse d’Irène K.)

Et tu penses, Marc, qu’il y a une ligne claire entre tes deux catégories? Et où mets-tu les vacciné·es anti-CST, car j’en connais, et même de très près… ? 😉 Et toute la politique d’imposition du CST n’a-t-elle pas pour but de pousser des gens à se faire vacciner pour (je te cite), ne pas “être privé de Marbella ou de boîtes de nuit” (ou je dirais simplement : aller au cinéma ou boire un verre…) ?

(Réponse de Marc à Irène)

Oui, bien sûr, il y a de la porosité. De tous les côtés. Par exemple, j’ai des amis antivax qui pestent à mort contre les “opportunistes” dont l’opposition au vaccin s’éteint avec les contraintes du CST. Mais le CST lui-même ne peut être LA solution dès lors qu’on admet qu’un contrôle sérieux est impossible.
La grande erreur des dirigeants, partout dans le monde est de promettre un “bout du tunnel” alors qu’on ne sait pas encore si le tunnel a un bout et si l’avenir n’est pas plutôt à une modification durable de certaines de nos manières de vivre.
Ayant moi-même fait le covid APRES avoir été vacciné, je sais que le vaccin n’est pas LA solution mais seulement un élément dont l’ajout marginal est important.
La manifestation de Bruxelles n’était que l’occasion pour moi de dire quelque chose que je pense depuis toujours mais que la situation actuelle met remarquablement en évidence, à savoir que la propagande typique dans nos sociétés est la fabrication d’un humain pour qui toute contrainte collective est une atteinte à sa “liberté sacrée”.
Je crois me souvenir que tu as pensé la même chose à une autre époque 😉 .

(Réponse de Marianne B.)

Bonjour et merci pour ce post. Personnellement, je ne suis pas contre les vaccins dans l’absolu. Par contre, il me semble qu’une large partie des manifestants, de dimanche ou en général sur ce thème, expriment simplement une liberté fondamentale qu’est le droit de gérer son propre corps et cela n’a rien d’un caprice liberaliste ! J’ai fait également le COVID versus sévère et long, début mars 2020 ( toujours en suivi). Je suis toujours immunisée, après presque 2 ans ! Mon sang peut soigner les malades mais je me vois traitée comme une incivique ou d’égoïste parce que non vaccinée… alors que je fais des tests rapides tous les 2 ou 3 jours et que, même négative, je garde les gestes barrières… j’assiste, par moment, à une névrose covidale … de personnes qui ne l’ont pourtant jamais fait ! J’ai le droit de choisir ce qui rentre dans mon corps et nul n’a le droit de me juger pour cela. Cela s’appelle aussi la protection des données personnelles !

(Réponse de Jean-Pierre D.)

Merci Marc pour cet avis éclairé. Je partage absolument. Ma perception des évènements est teintée d'”incertitude”. L’incertitude est un mot que nous avions oublié, insupportable pour beaucoup mais portant omniprésent dans le monde scientifique. Le grand public fait confiance aux scientifiques… pour autant qu’ils parlent d’une seule voix. Si les dissensions apparaissent, ils sont voués aux gémonies.
Un autre mot merveilleux que nous avons vu réapparaître est : Altruisme. Le vacciné se protège mais protège aussi les autres.
A ceux qui parlent d’un vaccin expérimental je me demande quand un produit cesse d’être expérimental et devient mature. Mes pensées vont aussi à ces « volontaires » qui ont testé le vaccin dans sa phase expérimentale. Quel Altruisme !
Je me demande quel est l’antonyme de ce merveilleux mot. On pourrait sûrement l’appliquer aux antivax.

(Réponse d”Hermès G.)

Quelle naïveté de croire que d’aucuns se font vacciner par soucis du bien commun ou des autres ! La première motivation d’un vaccin, c’est d’éviter la maladie pour soi et c’est un moteur tout aussi égoïste que celui conduit au refus du vaccin … par peur des effets secondaires ou d’une quelconque manipulation ! Je suis parent et si mes enfants sont vaccinés contre diverses maladies infantiles … c’est uniquement et avant tout parce que je ne souhaite pas qu’ils tombent malades. Idem pour moi et la covid19 ! Ça n’empêche que je refuse de sortir mon CST aussi vert soit-il ! Ce CST n’a aucun intérêt sanitaire (les experts agrées par le gouvernement l’ont d’ailleurs dit.) et est uniquement un outil de coercition douteux ! Mettre en avant la démocratie et défendre le CST relève au mieux de l’ignorance et au pire de la mauvaise fois … vous ne me semblez pas ignorant !

(Réponse de Marc à Hermès)

Bien entendu ceux qui se font vacciner peuvent avoir AUSSI des motivations égoïstes. Mais ceux qui refusent le vaccin ne peuvent avoir QUE des motivations égoïstes. Cela me paraît faire une différence. Mais à nouveau, l’essentiel n’est pas là. L’essentiel est celle de ceux qui refusent TOUTE mesure de contrainte au nom de la “liberté”.

(Réponse d’Hermès à Jean-Pierre D.)

Jolis raccourcis simplistes ! ! « Je me vaccine d’abord par souci pour ma santé » = l’altruisme m’est inconnu (ça s’appelle de la vindicte populaire) et « non-vaccinés » = antivax (c’est oublier que 1,5 millions de non-vaccinés, soit 2/3, sont des enfants de moins de 11 ans et que d’autres ne souhaitent pas faire le vaccin, par exemple, après avoir fait la Covid !) … Belle soirée à vous !

(Réponse de Jean-Pierre D. à Hermès)

Au début de la pandémie, un des premiers soucis des personnes que je connais était moins la crainte d’être contaminé que de contaminer d’autre personnes proches. Certains parmi le personnel soignant ont dormi sur leur lieu de travail pour ne pas contaminer leurs proches. Je reviens vers ceux qui se sont porté volontaire pour tester le vaccin alors en phase expérimentale. Je pense vraiment que ceux qui refusent le vaccin en prétendant qu’il est “expérimental” insultent les premiers. Altruisme, oui je trouve ce mot admirable même si vous vous y voyez de la naïveté. Si l’altruisme vous est inconnu c’est bien triste. CST instrument de coercition, pourquoi pas. Je serais plutôt pour le vaccin obligatoire mais le CST permet aux antivax de garder leur liberté en restant chez eux.

(Réponse d’Hermès à Marc)

Aucun souci pour des mesures de contraintes … à conditions qu’elles soient cohérentes, respectueuse du droit et proportionnées … on est loin du compte !

(Réponse d’Hermès à Jean-Pierre D.)

Nous ne parlons pas des mêmes personnes. Vous me parlez d’antivax et moi de ceux qui refusent le vaccin … Ne parlons pas, ce sera plus confortable pour tout le monde.

(Réponse de Jorge P. à Marc)

D’accord grosso modo avec toi et les auteurs que tu cites sur ce que “celui qui dit avoir peur du vaccin mais qui se précipite pour le prendre parce que sinon, il pourrait être privé de Marbella ou de boîtes de nuit (…) celui-là n’est pas un antivax. C’est juste un enfant gâté et un “gosse de riche”. Quoique, lorsque on est adolescent, être privé de camp scout, de voyage scolaire, de folklore étudiant, c’est à dire de la vie sociale de jeune, n’est pas quelque chose à minimiser. Les conséquences psychologiques déjà connues de tout cela, sur fond de Covid, non plus.
Ceci dit, il me semble qu’il y a deux distinctions importantes qui manquent dans ton post.
1) Tout d’abord, il y a vaccins et “vaccins”. Parmi les premiers, tous ceux à virus atténué ou inactivé, les vaccins traditionnels, de l’enfance. À distinguer de ces injections anti-Covid de code génétique pondues en quelques mois, là ou habituellement il faut des années et se trouvant toujours en phase 3 des essais cliniques (jusque mai 2023 pour le Pfizer), de sorte qu’il s’agit de produits médicaux expérimentaux ne disposant pour la même raison que d’une autorisation conditionnelle et provisoire. Pour certains il n’est même pas sûr qu’on puisse les appeler “vaccins”. Les antivax seraient des gens opposés à tout vaccin. Par contre, il n’est pas pertinent d’appeler antivax celles et ceux qui se posent des questions sur les injections géniques expérimentales et refusent leur inoculation dans leurs corps, jusqu’à plus ample informés.
2) Je peux partager aussi cette proposition selon laquelle “le discours qui refuse toute mesure contraignante de protection au nom de la «liberté» tient, lui, d’une autre logique : c’est le résultat de trois quarts de siècle de propagande en faveur de l’individualisme «possessif». En effet, la vie en société implique des contraintes que les citoyens se doivent d’accepter lorsque celles-ci sont décidées démocratiquement.
(La proposition suivante me semble caricaturale : “cette idée que toute restriction de nos désirs individuels est forcément une dictature”. Une manière, pour moi, de ridiculiser celles et ceux, y compris des juristes, qui s’inquiètent de la menace contre l’état de droit constituée par un recours excessif à l’état d’urgence et à l’inversion de la pyramide du droit, donnant à des arrêtés ministériels plus de poids qu’aux lois voire qu’à la Constitution. Mais, passons).
Or, il faut distinguer ce “discours qui refuse toute mesure contraignante de protection au nom de la «liberté»” du discours à mon avis légitime qui refuse l’injection obligatoire –que ce soit au seul personnel soignant ou à toute la population – d’un produit médical expérimental car cette obligation violerait, en matière d’expérimentation médicale, la loi belge Droits des patients, le Code de Nuremberg et la Convention d’Oviedo.
Faire pression à la “vaccination” via l’imposition de mesures pénibles et d’un pass sanitaire, sans apporter de manière proactive une information complète, détaillée et éclairante sur la nature et statut de ces injections et sur leurs effets secondaires invalidants voire mortels, constitué un chantage à l’extorsion du consentement violatoire aussi des loi et instruments internationaux cités plus hauts.
Contester, refuser, s’insurger contre l’extorsion de consentement et l’imposition de cette injection sur son corps est, dans ce contexte, complètement légitime. Protéger ses enfants, pratiquement pas concernés par ce virus, l’est davantage…
Sur l’ensemble, il me semble que ton post repose sur un mythe non prouvé scientifiquement : le “vaccin” qui sauve, autour duquel on construit un discours moralisant, qualité salvatrice démentie jour après jour par les faits : les pays les plus “vaccinés” au monde sont ceux qui souffrent de plein fouet des flambées épidermiques actuelles. Cela peut aussi s’appliquer à la Flandre relativement à Bruxelles…

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