Interview de Françoise Nimal, pasteure L’UTÉRUS DE DIEU ET LES VERGES DU PATRIARCAT

Si une bombe avait explosé au chœur de la cathédrale de Reims, elle n’aurait pas pu faire plus de dégâts dans l’Église Catholique de France.
Commandité par l’Église elle-même, le rapport de la CIASE (Commission Indépendante sur les Abus Sexuels dans l’Église) a en effet comptabilisé plus de 330.000 victimes d’abus sexuels depuis 1950 au sein de cette institution.
Un chiffre qui donne le vertige.
Dix abus sexuels par jour, tous les jours, depuis septante ans !

 
En soulignant en outre son caractère “systémique”, “qui se poursuit aujourd’hui”, les vingt-deux membres de cette commission indépendante, dirigée par Jean-Marc Sauvé, ont laissé l’Église de France en état de KO technique.
D’autant que ces crimes à répétition ont souvent et longtemps été cachés par l’Église Catholique elle-même, ce qui pourrait en faire la plus grande et la plus ancienne organisation criminelle de France.
Il est donc totalement ahurissant que la première réaction des Évêques de France, par la bouche de leur porte-parole, Eric de Moulin-Beaufort, ait été de monter au filet pour défendre “le secret de la confession, qui s’impose à nous“, qui est “en ce sens-là, plus fort que les lois de la République“.
Ce type se rend-t-il au moins compte de ce qu’il raconte ?
Sait-il que les complicités dans des affaires de viol, ainsi que les manœuvres d’obstruction à la justice, sont punies en France par des peines de prison ?
Faut-il les jeter derrière les barreaux pour qu’enfin “le franc tombe” ?
Ou s’estiment-ils, une fois pour toutes, au-dessus des lois de la République, quand bien même le caractère massif et systémique de ces crimes a aujourd’hui été révélé au grand jour ?

Il m’a semblé intéressant de voir comment une “femme d’église” pouvait réagir à la dénonciation d’aussi anciennes et aussi massives pratiques.
Pasteure de l’Église Protestante Unie à Verviers, mais issue d’une famille catholique, se définissant elle-même comme “féministe, mère de famille monoparentale et militante LGTB” (1), avec une formation de théologienne, de psychologue et de journaliste, Françoise Nimal a sans doute un profil aujourd’hui atypique dans les milieux chrétiens. Je doute fort qu’elle ne soit jamais en odeur de sainteté au Vatican.
Mais cela lui donne aussi une liberté de ton et de parole qui devrait aujourd’hui pouvoir être entendue face à l’assourdissant silence d’une Église Catholique en état de choc et de sidération. Avec qui d’autre sinon aurais-je pu parler de l’utérus de dieu ?

Claude Semal, le 14 octobre 2021

Claude : Pour commencer, histoire de savoir qui parle à qui, moi je suis né dans une famille laïque, et je suis athée. Je suis toutefois parfaitement conscient que si j’étais né dans une autre famille, ou dans un autre pays, je pourrais être musulman, bouddhiste… ou protestant. Je considère donc plutôt mon athéisme comme un fait culturel, et non comme une qualité (ou un défaut) particulier.
Françoise, toi, depuis six ans, tu es pasteure de l’Eglise Protestante Unie à Verviers.
Sans entrer dans un grand débat théologique, qu’est-ce qui la distingue de l’Eglise catholique ?
Il y a au moins une différence qui saute aux yeux : tu es une femme (sourire). Et je ne pense pas non plus que les protestants pratiquent le rituel de “la confession”, ni a fortiori, n’appellent à protéger son “secret”.

Françoise Nimal, pasteure à Verviers

Françoise : Non, en effet. Je sais que ce “secret de la confession” a été évoqué au sein de l’Eglise Catholique pour ne pas rendre public certains faits. Quand les gens se confient à nous, nous sommes bien sûr tenus, comme les psychologues, à un certain devoir de réserve. Mais en aucune façon cela ne peut être légalement invoqué pour masquer des actes criminels.
La question de la confession comme sacrement intervient surtout quand c’est l’agresseur qui se confie à un autre prêtre. Là, il y a clairement eu protection des abuseurs. Mais elle est aussi cruciale dans le dispositif de l’abus lui-même.
Le rapport de la CIASE a relevé de nombreux cas où l’agresseur sexuel s’en prenait aux jeunes dans ce cadre-là, précisément : la “confession”. Un cadre intime, où il est facile de manipuler l’autre. Car l’ascendant sur les personnes “confessées” est terrible.
Une autre grosse différence théologique, c’est que dans l’Eglise Catholique, il y a un tout clergé, des prêtres “sacralisés”, qui se vivent eux-mêmes comme les représentants de dieu sur Terre. Ce qui conduit donc à cette abomination théologique : si un curé viole un petit scout dont il est l’aumônier, quel “dieu” incarne-t-il pour ainsi se donner le droit de le violer ? D’un point de vue pastoral, comme du point de vue des croyants, il y a là une terrible transgression.
Nous les pasteur·es, nous ne sommes pas “consacré·es”. Je ne dirais pas que c’est un métier comme un autre, parce qu’il y a évidemment une question de vocation, mais ce n’est pas cette idée qu’on est… euh…

Claude: … une race à part ?

Françoise: Voilà. Exactement. Luther avait insisté sur le sacerdoce universel. Chacun et chacune doit pouvoir endosser ce rôle. Il faut tout le temps le rappeler, parce que, comme nous sommes dans un monde encore fort imprégné par le catholicisme, les gens nous voient souvent comme “à part”. Or nous ne sommes pas “plus doués en prières” (rire), on a juste suivi une formation pour occuper cette fonction, notamment une formation à l’exégèse, à la lecture critique des textes bibliques.
Chez les catholiques, par contre, un prêtre va rester prêtre pour l’éternité. C’est ça leur vision du monde. J’ai des amis défroqués, ils sont hors de l’église, mais quelque part on leur dit : “vous êtes toujours prêtres”. Puisque théologiquement, c’est “dieu” qui les a consacrés, il n’y a que dieu qui pourrait les en défaire. C’est un truc un peu malsain. Bon, je ne devrais pas dire ça (rire).
Bref, dans le clergé catholique, il y a cet “entre soi” masculin, un rapport malsain à la sexualité, et surtout, un rapport au pouvoir et à l’autorité qui a été complètement dévoyé. L’obéissance est en effet présentée comme une vertu cardinale.
J’ai assisté récemment à une journée de formation pastorale avec une psychologue…

Claude: Cela représente combien de personnes, les pasteurs en Belgique francophone ?

Françoise: A peu près quatre-vingt, dont un quart de femmes. Mais tu as aussi les pasteurs protestants “évangélistes”, qui ont leur propre quota. Eux ont sans doute un autre rapport à l’autorité, quelque chose de plus… sectaire, mais ils ne sont pas structurés entre eux en institution, comme l’Eglise Catholique.
Lors de cette formation, on nous demandait d’être bien attentifs à ne pas reproduire une situation “d’emprise” sur les personnes, parce que même s’il n’y a pas de “confession”, il y a souvent un accompagnement individuel des personnes. Il faut résister à cette tentation “d’emprise” sur des personnes parfois fragiles, parce que dans les faits, on n’est pas toujours dans une relation “égalitaire”.
Alors que les prêtres, eux, se sentent dans une position “légitime” de pouvoir par rapport à “leurs fidèles”, puisqu’ils ont été “choisis” et consacrés “par dieu”. Ce sont les bergers qui guident le troupeau… et cela ouvre la porte à tous les abus. Sacraliser une personne, ce n’est jamais bon.

Claude : Tu es née dans une famille catholique ou protestante?

Françoise : Catholique, mais mon père venait du protestantisme. On était dans un tout petit village, j’allais à la messe, j’ai fait ma communion…

Claude : Il y a donc eu de ta part un détachement, une démarche vers le protestantisme, parce qu’en tant femme, je le suppose, tu ne trouvais pas ta place dans l’église catholique ?

Françoise : À quatorze ans, je voulais devenir religieuse. Mais je me suis rendu compte que cela n’allait pas aller, parce que l’obéissance et tout ça, ce n’était pas mon truc (rires). Note bien que les prêtres, eux, ne doivent pas faire vœu d’obéissance, ce sont seulement les religieux et les religieuses. Mais comme la voie de la prêtrise m’était fermée…

Claude : Tu t’es spontanément définie comme femme pasteure, famille monoparentale, féministe, avec même un volet “militante LGTB”… Or le texte fondateur de tous les chrétiens reste la Bible, c’est à dire un texte pluriséculaire fortement marqué par la société patriarcale qui l’a vu naître. Comment concilies-tu ton engagement comme féministe avec cette réalité théologique ?

Françoise : Pour moi, c’est un texte écrit par des humains dans un certains contexte historique. Ce n’est pas la parole de dieu descendue sur Terre. Bien sûr, mon point de vue n’est pas celui de tout monde, d’autres donnent à ce texte une dimension plus “sacrée”.
Du coup, comme féministe, on va s’attacher à privilégier certains textes, aux “femmes fortes” qui sont présentes dans certaines histoires. Mais j’ai du mal par exemple avec les lectures qui minimisent le sexisme de certaines lettres de Paul. Il ne faut pas essayer de “tordre” les textes. C’est clair, ce n’est pas un féministe (rires).
Avec la question du climat, je me pose aussi beaucoup de questions sur la place de l’homme dans la nature, sur son rapport à la vie, aux plantes, aux animaux. Dans la Bible, c’est clair, il est au centre de tout. Or respecter la création, ce n’est pas asservir et détruire le reste la planète.

Un “entre soi” parfois très étrange (pardon Françoise)

Claude : En ce qui concerne les causes des abus sexuels massifs dans l’Église Catholique de France, tu as déjà cité “l’entre soi” masculin, et l’autorité “magique” des prêtres sur ceux et celles qui les entourent. Néanmoins, toi qui a étudié la psychologie, qu’est-ce qui peut se passer dans la tête d’un gars qui est visiblement en train de transgresser toutes les règles et tous les préceptes de sa propre religion – puisqu’il nous parle par ailleurs de fidélité ou de chasteté ? Et qui plus est vis-à-vis d’enfants ?
En plus, selon le rapport de la CIASE, ce n’est pas l’histoire de quelques fous ou malades, mais une pratique systémique à l’intérieur d’une institution, qui concerne des dizaines de milliers de personnes pendant des dizaines d’années ? Je ne crois pas en dieu, mais cela donne presque envie de croire au diable (rire un peu jaune).

Françoise: Oui, c’est complètement fou. C’est difficile à appréhender.
Il y a deux ans, j’avais lu le livre “Sodoma”, une enquête de quatre ans sur l’homosexualité dans l’église catholique et au Vatican. Et je m’étais posé la même question. Comment est-il possible d’assumer une telle imposture entre les principes dont on se réclame, et ce qu’on est soi-même en train de vivre ?
C’est un mécanisme de déni particulièrement pervers.
Et puis, au delà des chiffres, qui sont terribles, il y a chaque fois le témoignage d’une victime, une personne dont la vie a parfois été détruite. Et du côté des abuseurs, il y a chaque fois aussi une personne, qui a réussi, je ne sais pas comment, à faire comme si cela “n’était pas grave”. Oui, c’est complètement fou. Contraindre un enfant à une fellation, comment peut-on ne pas trouver cela “grave” ?

Claude: Peut-être parce que, avant de se transformer en abuseur, on a préalablement été soi-même victime de ces pratiques. C’est le côté systémique ou pervers d’une institution ou certaines pratiques peuvent ainsi se transmettre de génération en génération : une partie de ces violeurs ont été eux-mêmes violés.

Françoise : C’est vrai. Concernant les abus sexuels, on ne voit de toute façon qu’une partie de l’iceberg. Ceux de l’Église sont supérieurs à ceux qu’on peut par exemple rencontrer dans un Club sportif, mais pas supérieurs aux abus sexuels intrafamiliaux. Cela donne une idée de l’ampleur du phénomène.
Ce qui est grave aussi, c’est la façon dont ces “cas” ont été traités par l’Eglise Catholique une fois qu’ils sont dévoilés. Comme si “ce n’était pas trop grave”. La plupart du temps, on les envoyait simplement ailleurs. Dans d’autres paroisses, au contact d’autres enfants. Où ils pouvaient tranquillement récidiver. C’est là aussi qu’il y a un problème institutionnel : les choses se règlent “en secret”, ou plutôt, ne se règlent pas.

Un univers d’hommes un peu particulier

Claude : Et qu’est-ce qui a alors poussé l’Église Catholique de France à cette fois commanditer elle-même cette enquête, et à se remettre ainsi frontalement elle-même en cause ? Car le résultat est sans doute pire que tout ce qu’ils avaient pu imaginer.
Il y a même des chrétiens qui demandent aujourd’hui une démission collective des évêques de France.
L’église catholique de France semble en effet fonctionner comme une association criminelle, puisqu’on on y commet régulièrement des crimes qui sont masqués par l’institution elle-même. Dix enfants abusés par jour, tous les jours, depuis septante ans ! Et encore aujourd’hui !
Aussi, je trouve totalement ahurissant que, suite à la publication de ce rapport, le porte-parole des évêques, Eric de Moulins-Beaufort, n’a rien trouvé de mieux à déclarer que “le secret de la confession s’impose à nous et, en ce sens-là, il est plus fort que les lois de la République“. Je te laisse imaginer quelles auraient été les réactions en France si un imam avait fait une déclaration de ce type !

Françoise : Déjà, je voudrais redire ma sympathie pour les très nombreuses et nombreux catholiques de la base qui se trouvent “groggy” et désemparés devant l’ampleur du phénomène. Beaucoup, y compris parmi les prêtres, sont sincèrement demandeurs de changement dans cette institution qui disjoncte ! Cela a pu jouer dans le souci de voir les choses en face. Mais c’est sans doute d’abord grâce aux victimes que ça a pu bouger.
Je crois qu’il y a eu une première vague de témoignages, des gens courageux, au début souvent isolés, mais qui se sont organisés entre eux, et que suite à cela, il est progressivement devenu impossible de simplement remettre le couvercle sur la casserole.
En Belgique, depuis une enquête en 2012, l’église publie annuellement un rapport sur les abus sexuels en son sein. L’année passée, ils avaient relevés une soixantaine de “cas”.
Est-ce qu’ils ont été dénoncés à la justice ? Je ne suis pas au courant, je t’avoue.
Il faut qu’ils arrêtent, maintenant. Je sais que monseigneur Gaillot avait déclaré : “Si les femmes pouvaient rentrer dans le clergé, cela changerait peut-être les choses”. C’est vrai que cela changerait sans doute une certaine dynamique.

Une foi mise à rude épreuve

Claude : Tu te définis comme féministe. Ce que j’ai toujours considéré comme particulièrement insupportable dans l’église catholique, c’est que les ordonnances qui relèvent de la famille et la sexualité soient édictées par des assemblées d’hommes, des vieillards supposés puceaux, sauf ceux, découvrons-nous aujourd’hui, qui auraient préalablement été violés par leur curé.
C’est je crois mettre la “gestion” de la famille et du corps des femmes à un endroit où elle n’aurait jamais dû se trouver.
A ce sujet, je sais que tu fais partie d’une association qui s’efforce de favoriser l’intégration des minorités sexuelles dans les églises (1).
Ce qui est aussi, je le suppose, une façon de sortir la sexualité du strict domaine de la reproduction, ce à quoi elle est généralement réduite par les préceptes catholiques. Comment cette démarche est-elle accueillie par les églises aujourd’hui ?
Accueillir les homosexuels dans l’église, est-ce considéré comme un “acte charitable”, ou bien l’église admet-elle aujourd’hui qu’il y a d’autres façons de vive sa sexualité que pour faire des enfants à l’intérieur des “liens sacrés du mariage” ?

Françoise: Là il faut vraiment distinguer l’église catholique de l’église protestante, puisque chez nous (Eglise Protestante Unie de Belgique et aussi dans d’autres pays), on célèbre par exemple des bénédictions de mariage de couples de même sexe. Chez les catholiques, quand il y a une démarche dite d’accueil, c’est souvent en mode : “les pauvres, il faut quand même les accueillir”, avec l’idée que les homosexuels sont quand même toujours un peu malheureux (rire).
Chez les protestants, la sexualité n’est pas nécessairement liée à la procréation.
Mais ce n’est pas pour autant que les églises ne nous accueillent pas à bras ouverts en disant “chouette, voilà des gens qui ont une autre vision du monde, cela va enrichir le champ théologique, en montrant le côté “queer” de dieu”. Je ne sais pas pourquoi, cela ne les enthousiasme pas beaucoup” (rire).
Si je peux revenir avec un peu de divin, dieu nous dépasse, et le réduire à la Manif pour Tous, “papa, maman, deux enfants, sinon c’est un mensonge”, les filles en rose, les garçons en bleu, et tout va bien, je trouve cela terriblement réducteur.

Claude : Tu t’es aussi définie comme maman dans une famille monoparentale. C’est un enfant à toi, ou un enfant que tu as adopté ?

Françoise : Non, depuis trois ans, je suis “famille d’accueil”, c’est un petit qui a été placé. Bon, c’est un autre sujet, mais cela m’a amené à comprendre comment une maman seule peut être écartée du champ social, parce que les réunions et les activités se tiennent le soir, et que tu ne peux pas toujours trouver ou te payer quelqu’un pour baby-sitter. On est tout à coup cantonné à la vie domestique.

L’utérus de dieu

Claude : Cela va peut-être te sembler provocateur, mais si c’est dieu ou le divin qui a engendré l’univers, est-ce que ce n’est pas une fonction féminine, ça ? Et si dieu était une femme ? (sourire)

Françoise : Ah! Mais il y a des passages bibliques où on parle de “l’utérus de dieu”, du moins dans la version hébraïque, celle de l’ancien testament.

Claude: Comment se fait-il alors qu’au départ de cette fonction féminine première, dans tellement de religions, ce soit ensuite la parole des hommes qui est tellement privilégiée ?

Françoise : Parce que les hommes nous confisquent tout (rire). Mais dans l’église catholique, cette espèce de patriarcat au cube, et peut-être aussi chez les lamas, c’est quand même très particulier. Non seulement le sacré est confisqué par les hommes, mais ils ont construit autour un patriarcat institutionnel particulièrement rigide.
Dès le début du protestantisme, les femmes ont été beaucoup plus présentes. On peut même dire que cela part de Luther, qui est dans sa réflexion théologique, mais qui voulait aussi aimer et épouser une femme. Cet homme-là va donc sortir du “bizarre” modèle de “l’entre soi” masculin pour retrouver une vie sexuelle et familiale “normale”.

Claude : Dans l’église catholique, monseigneur Gaillot avait avancé l’idée d’une possible ordination des femmes. Est-ce que les lignes sont en train de bouger de ce côté-là ?

Françoise : Non, tout s’est refermé. La question du célibat des prêtres est encore parfois abordée, mais pour l’ordination des femmes, la porte est complètement close. Il y a toutefois un mouvement de femmes, en France, qui postulent systématiquement (et en vain) à toutes les fonctions ecclésiastiques, en espérant ainsi faire avancer le débat (2).

Claude : Cela date de quand, le célibat des prêtres ? Si je me souviens bien, cela ne date pas du tout début de l’église chrétienne ?

Françoise : Vers 300 après Jésus-Christ, il est fortement conseillé. Mais il ne devient une obligation qu’au début du XII ème siècle.
Il y a cette idée de “disponibilité”. Si le prêtre n’a pas de charge de famille, il serait “plus disponible”. On voit ce que cela donne ! Chez les protestants, pendant des années, cette vision a ainsi permis au pasteur de s’occuper des fidèles, et sa femme, de la maison et des enfants. Évidemment, depuis que les femmes deviennent pasteures, cela change complètement la donne. Je connais même aujourd’hui des couples “mixtes” où la femme est pasteure, et le mari, complètement athée… Ceci dit, en Belgique, il y a proportionnellement beaucoup moins de femmes pasteures qu’en France ou en Suisse. Ce qui fait dire à certains que la “profession” se dévalorise parce qu’elle se féminise (sourire très jaune).

Claude : Y a-t-il encore quelque chose que tu voudrais ajouter ?

Françoise : Je ne suis pas sûre d’avoir toujours dis des choses hyper pertinentes. On a le rapport, on a les chiffres, on a les conclusions… Ce qui me reste comme question, ce serait de connaître la situation réelle en Belgique, parce que si on applique la même économie d’échelle, le phénomène devrait être plus massif que ce qu’on en connait aujourd’hui.

Propos recueillis par Claude Semal le 14 octobre 2021

(1) Françoise est aussi membre du CA du Carrefour des Chrétiens Inclusifs, association francophone qui promeut l’inclusion inconditionnelle des personnes appartenant aux minorités sexuelles et de genre dans les églises et mouvements chrétiens. ( chretiensinclusifs.org )

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1 Commentaire
  • Jean-René THONARD
    Publié à 00:45h, 24 octobre

    Merci à Claude pour cette belle interview sereine, limpide et respectueuse des “gens de foi” ! Merci à Françoise pour ce beau témoignage de femme libre et colporteuse de la Parole de Dieu, source de respect, de liberté et d’émancipation pour tous les humains ! Jean-René THONARD, de Verviers, prof de religion catho pendant 35 ans, dans l’enseignement spécialisé, militant syndical.

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