JOSÉ FONTAINE, ROMAIN GARY, LA REVUE NOUVELLE, LE VIDE

François Boulo dit des JT qu’ils ne parlent plus “que des inondations et des randonnées à vélo de la famille Michu”. Je regarde tous les jours le JT de la RTBF pour mesurer le vide politique de nos médias conformistes (et continuerai), vide de plus en plus vide. Je suis abonné aussi à “La Revue nouvelle” où se creuse un vide analogue (et je lui resterai fidèle). Cette revue a eu 75 ans. Je m’attendais qu’à cet anniversaire elle parle de tout ce qu’elle a traversé comme revue chrétienne et comme revue belge, bref qu’elle dialogue avec son Histoire et l’Histoire. J’ai lu des considérations sur le plaisir sexuel féminin, le régime des détenus, la montée d’Ecolo (toutes choses importantes, je ne le nie pas). Le n° qui vient de paraître va plus loin encore : il est consacré précisément au vide. Un historien dans ce n°-ci conclut que “la ligne directrice d’un rapport raisonné au monde” se situe “dans la modestie face à la complexité irréductible du réel et de l’ambition démesurée [Wouah !!!] de faire preuve d’une intelligence et d’une rigueur [Ouf!] suffisantes pour l’affronter.”
Nous sommes face au problème crucial de la question nationale en Belgique et (ce qui lui est lié),le projet d’ une Union européenne dont la finalité est la destruction de la démocratie politique, économique et sociale. Bien entendu ces questions autrefois traitées par la RN ne le seront plus jamais. Je lui adresse les mots de Romain Gary à propos de la collaboration douce (dans “La Promesse de l’aube”) :
Je suis sans rancune envers les hommes de la défaite et de l’armistice de 40. Je comprends fort bien ceux qui avaient refusé de suivre de Gaulle. Ils étaient trop installés dans leurs meubles, qu’ils appelaient la condition humaine. Ils avaient appris et ils enseignaient « la sagesse », cette camomille empoisonnée que l’habitude de vivre verse peu à peu dans notre gosier, avec son goût doucereux d’humilité, de renoncement et d’acceptation. Lettrés, pensifs, rêveurs, subtils, cultivés, sceptiques, bien nés, bien élevés, férus d’humanités, au fond d’eux-mêmes secrètement, ils avaient toujours su que l’humain était une tentation impossible et ils avaient donc accueilli la victoire d’Hitler comme allant de soi. À l’évidence de notre servitude biologique et métaphysique, ils avaient accepté tout naturellement de donner un prolongement politique et social. J’irai même plus loin, sans vouloir insulter personne: ils avaient raison, et cela seul eût dû suffire à les mettre en garde.Ils avaient raison, dans le sens de l’habileté, de la prudence, du refus de l’aventure, de l’épingle du jeu, dans le sens qui eût évité à Jésus de mourir sur la croix, à Van Gogh de peindre, à mon Morel [le héros des « Racines du ciel »], de défendre ses éléphants, aux Français d’être fusillés, et qui eût uni dans le même néant, en les empêchant de naître, les cathédrales et les musées, les empires et les civilisations“.

José Fontaine (avec la complicité active de Romain Gary)

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