MAMAN SOLO : LÀ, JE RESTE SANS VOIX par Bernadette Schaeck

Parce qu’elle a eu la chance de trouver un propriétaire qui lui a donné les clefs de l’appartement avant de percevoir la garantie locative du CPAS et le premier loyer… le CPAS lui a refusé la garantie locative et le premier loyer.
Parce qu’elle avait, le jour de la visite à domicile, un appartement sans meubles et sans équipement de cuisine, le CPAS lui avait refusé le revenu d’intégration… au prétexte qu’elle ne résidait pas là.
Entretemps, elle s’est débrouillée pour trouver quelques meubles et un minimum d’équipement, et elle a enfin obtenu le revenu d’intégration.
Mais il y a “un trou” d’un mois et demi sans revenu, deux mois de loyer impayés et une garantie locative en attente. Elle est à présent menacée d’expulsion du logement avec ses deux enfants.
Je suis pourtant souvent confrontée à des situations de grande injustice, mais là, je suis sans voix.
Face à un logement vide, le CPAS ne devrait-il pas aider à le meubler, plutôt que refuser toute aide au prétexte qu’il n’est pas encore habité ?
Aucun problème à laisser une femme seule avec deux enfants, mise à la porte par son compagnon, sans aucun revenus ?
Je suis tellement dégoutée que je n’ai même pas envie de contacter ce CPAS de m… Il le faudra bien, pourtant.
Ce CPAS profite évidemment des subsides du fédéral pour animer un groupe de femmes qui sont mamans solos via l’appel à projet Miriam. Une fois encore, priorité à la lutte contre la pauvreté infantile ? Une fois encore, priorité à la défense des familles monoparentales ?
Cherchez l’erreur !

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Une autre maman solo.
Elle travaille à temps partiel.
Elle a droit au “revenu d’intégration” (RI) en complément à son salaire de misère.
Elle rentre chaque mois sa fiche de salaire au CPAS dès qu’elle la reçoit. Mais le dernier paiement du RI l’a été pour février. Mars, avril et mai ne sont toujours pas payés.
Elle doit survivre – et aller travailler – avec un revenu inférieur de 500 euros en moyenne au Revenu d’Insertion “cheffe de famille”.
Priorité à la défense des familles monoparentales, qu’ils disent…
L’emploi est le meilleur moyen de lutte contre la pauvreté et la voie royale pour l’intégration sociale, qu’ils disent…
Encore un courrier au CPAS. Mais ce qu’il va falloir trouver, c’est le moyen que plus jamais ce genre de situations ne se produisent

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Jugements de valeur : c’est non !
Rapport d’inspection 2022 du CPAS de Fexhe-le-haut-clocher :
L’inspectrice a mis l’accent sur plusieurs points :
De nombreux jugements de valeurs figurent encore dans les rapports sociaux. Ceux-ci n’apportent aucune plus-value dans le cadre de l’analyse du droit du bénéficiaire.
Comme elle l’a déjà indiqué en 2019, tant les rapports sociaux que les décisions qui en découlent ne peuvent en aucun cas faire mention de jugements de valeurs.
Il s’agit par ailleurs d’un principe consacré par le Code de déontologie belge francophone des assistants sociaux.

De nombreux jugements de valeur, donc, et ce depuis avant 2019.
Une pratique habituelle, donc, de toute évidence
Le Code de déontologie, ça doit s’appliquer aussi dans les petits villages hesbignons… Le respect des bénéficiaires, aussi.

Bernadette Schaeck, de l’Association de Défense des Allocataires Sociaux

Contact : http://www.adasasbl.be

Témoignage de Jessica Q. :
Au CPAS de La Roche en Ardenne , certaines assistantes sociales portent des jugements de valeurs dont j’ai été victime.
1) Dans un premier temps , parce que j’avais un diplôme universitaire , on m’a clairement dit qu’avec mon diplôme, si je ne trouvais pas de travail, c’était de la mauvaise foi.
2) J’ai accueilli un sans abri quelque temps et j’ai failli perdre tous mes droits car on a supposé (sans me le demander) que cette personne avait des revenus alors que ce n’était pas le cas et ensuite. On m’a ensuite clairement dit que je ne pouvais inviter qui que ce soit, même pas une cousine, plus de deux jours (on n’a donc pas droit à une vie sociale et encore moins à une vie amoureuse, sinon on est directement catalogué de fraudeur).
3) Suite à un viol (dont j’ai dû informer mon AS sinon pas d’aide) mon médecin avait prescrit que je fasse des séances de massage et du yoga étant donné les douleurs corporelles infligées, le stress et j’en passe. Résultat, on m’a dit que je m’offrais du luxe et toute aide m’a été refusée à cause de ça, malgré le papier du médecin, et en plus quand j’ai demandé à assister au conseil pour pouvoir me défendre, cela m’a été refusé car c’est interdit au CPAS de La Roche (ce sont les propos de la directrice générale) alors que je me suis renseignée et ce n est pas comme ça dans les autres CPAS (au contraire, ils apprécient que la personne soit présente au conseil).
Je ne suis pas la seule dans le cas, j’ai un ami qui est resté sans revenu ni chauffage durant tout l’hiver !!! Je ne sais pas s’il y a systématiquement des contrôles et comment ils sont pratiqués, mais au sein du CPAS de La Roche il serait grand temps car vraiment c’est humiliant et ils ne respectent pas nos droits non plus …

La réponse de Bernadette:
Bien sûr que si, vous pouvez assister au conseil si vous demandez à y être entendue concernant une décision qui vous concerne (1).
Et vous avez le droit qu’une cousine réside chez vous plus que deux jours.
Si vous ou d’autres bénéficiaires veulent nous contacter, vous pouvez le faire par messenger mais de préférence par mail contact@adasasbl.be ou tél 0489/75760

Jessica Q. :
Bernadette Schaeck merci beaucoup ! Je savais que mes droits n’étaient pas respectés mais je n avais pas la force de me battre pour faire valoir mes droits et mon ami non plus. Et ça nous a incité à déménager. Mais si un jour je me sentais dans le besoin je n’hésiterai plus à solliciter votre aide… J’en profite pour vous remercier de mettre toute votre énergie et votre cœur à veiller à ce que nos droits soient respectés, mais surtout à ce que l’on ne subisse plus toutes ses humiliations et préjugés… Merci de tout cœur , vous êtes un ange.

(1) https://www.adasasbl.be/2020/04/05/1401/

1 Commentaire
  • Camille Matthys
    Publié à 20:03h, 01 juillet

    Le dispositif de l’aide sociale doit dans doute être analysé mais on ne peut déresponsabiliser les assistant.te.s soci.aux.ales qui elles connaissent les situations mais se font les instruments du pouvoir décisionnel au lieu de défendre les droits des personnes. Ils et Elles se sont emparé.e.s et ont intègré.e.s totalement les valeurs morales , jugements et sanctions….: ce triste exercice du pouvoir ….pouvoir des minables. ( les faibles , les pauvres contre les plus faibles, les plus pauvres)
    Elles.ils en sont ,quoiqu’elles..ils veulent parfois s’en dédouaner, les acteurs.trices.
    (Oui je sais avec l’écriture inclusive ce n’est pas toujours très clair , d’ailleurs je m’embrouille moi-même ; j’ose espérer que cette confusion plait aux marionnettes du pouvoir).

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