NOUS SOMMES LE 2 AOÛT

Nous sommes le 2 août 2022.

Un hommage de Line Bautista

Il y a 113 ans, prenaient fin les événements connus sous le nom de Semaine tragique (Semana Trágica en castillan ; Setmana Tràgica en catalan) qui se sont déroulés à Barcelone et dans d’autres villes catalanes entre le 26 juillet et le 2 août 1909.
Bilan : 104 civils, 4 soldats et 4 membres de la Croix-Rouge y auront trouvé la mort.
Cela avait commencé par l’appel à la grève générale lancé par le syndicat anarchiste Solidaridad Obrera, pour protester contre l’envoi de troupes au Maroc espagnol afin de participer à la guerre coloniale de Mélilla. Le mouvement s’est transformé en émeutes : loi martiale, barricades, affrontements avec l’armée, tout le bazar… L’Église, qui soutenait le pouvoir, en a fait les frais : 18 églises, 49 couvents ou collèges religieux sont partis en flammes. Plus triste : le pédagogue libre-penseur et libertaire Francisco Ferrer sera fusillé après avoir été désigné comme responsable de ces événements.
Francisco Ferrer avait fondé en 1901 la première « École moderne », un projet éducatif rationaliste promouvant la mixité, l’égalité sociale, la transmission d’un enseignement rationnel, l’autonomie et l’entraide. En 1907, le réseau comptait plus d’une centaine d’écoles en Espagne. Cela n’était pas de nature à plaire au clergé catholique qui accuse Francisco Ferrer, en 1909, d’être l’un des instigateurs des troubles de la « semaine tragique ». Condamné à mort par un tribunal militaire à l’issue d’une parodie de procès, il est fusillé le 13 octobre. Amené devant le peloton d’exécution, il lance aux soldats : « Mes enfants, vous n’y pouvez rien, visez bien. Je suis innocent. Vive l’École Moderne ». Son exécution provoquera un important mouvement international de protestation.

(Ça n’a pas grand-chose à voir, mais je le dis quand même parce que ça me plaît : dans mon patelin, les deux rues qui mènent à l’école communale s’appellent «Francisco Ferrer » et « Célestin Freinet ». Sympa, non ?).

Tout autre chose…

Jesse Owens, athlète noir des JO de 1936 à qui ni Hitler … ni Roosevelt ne voulurent serrer la main.

À Berlin, en 1936, les XIe jeux olympiques viennent de débuter. Ils ont été inaugurés la veille, 1er août, en grande pompe, par le chancelier Adolf Hitler. La délégation allemande a défilé dans le stade olympique lors de la cérémonie d’ouverture. Pour la première fois, la flamme avait été portée en relais depuis Olympie jusqu’au site des Jeux, histoire de glorifier le Troisième Reich. Une idée retenue par Hitler, bien décidé à démontrer ses théories sur la supériorité raciale aryenne.
Ce 2 août 1936, Hitler reçoit dans sa loge des athlètes allemands vainqueurs des épreuves du jour pour les féliciter. Il quitte ensuite le stade avant que l’athlète américain noir Cornelius Johnson, qui a remporté l’épreuve de saut en hauteur, ne reçoive sa médaille. Les officiels font alors savoir au chancelier qu’il doit, soit féliciter tous les vainqueurs, soit n’en féliciter aucun. Hitler choisit de ne plus en féliciter aucun. Ça lui évitera d’avoir à féliciter à quatre reprises l’afro-américain Jesse Owens, qui remporta quatre médailles d’or (courses et saut en longueur) et sera certainement le héros le plus populaire de ces Jeux. À son retour aux États-Unis, Owens sera accueilli triomphalement et considéré comme un héros national… tout en restant un Afro-Américain privé de droits civiques. Le président Franklin D. Roosevelt, refusera d’ailleurs d’avoir un entretien avec lui à la Maison-Blanche.
Au chapitre des plus grosses conneries proférées au sujet des Jeux olympiques, la médaille d’or revient sans conteste à cette déclaration conjointe de Bernard Kouchner et David Douillet, en 2008, tandis que la flamme olympique, en route pour Pékin, se faisait quelque peu chahuter à Paris : « Tous les pays qui ont, dans le passé, accueilli des Jeux Olympiques ont progressé sur la voie des droits de l’homme ! » Fallait oser, hein !

Puisqu’on en est à distribuer les médailles de la connerie, profitons de ce 2 août pour nommer ex-aequo les 2 premiers morts de la Grande Guerre : le dimanche 2 août 1914, à Joncherey, sur le territoire de Belfort, le caporal français Jules Peugeot, du 44e RI, et le sous-lieutenant allemand Albert Mayer, du 5e régiment de chasseurs à cheval basé à Mulhouse, échangent des coups de feu. Ils tombent l’un et l’autre…avant même la déclaration de guerre !…

À propos de guerre…

Le 2 août 1940, après l’avoir dégradé au rang de colonel, puis mis à la retraite et enfin déchu de sa nationalité, le tribunal militaire de Clermont-Ferrand, condamnait Charles de Gaulle à la peine de mort pour trahison, atteinte à la sûreté extérieure de l’État, désertion en temps de guerre. Ses biens sont également confisqués. Qu’on se rassure : ça ne l’empêchera pas de faire encore une belle carrière.

Encore autre chose !

Une certaine confusion règne dans les agendas des faiseurs de journées mondiales. D’aucuns assurent que ce 2 août serait la journée internationale de la bière. D’autres désignent avec conviction la date du 5 août pour célébrer cette noble boisson que l’on brasse partout dans le monde depuis l’antiquité.
Quoi qu’il en soit, n’hésitons pas à déguster dès à présent une petite mousse. Et, de toute façon, nous remettrons ça le 5 août. Bonne journée.

Et ne manquons pas d‘écouter cette émouvante chansons de la guerre civile espagnole : « Si me quieres escribir » (Si tu veux m’écrire)

André Clette

C’est par ici : →

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