NOUS SOMMES LE 9 AOÛT

Nous sommes le 9 août 2022.

Le 9 août, nous fêtons Saint-Amour.
Même en étant le pire mécréant, s’il est un saint que l’on invoquerait volontiers, c’est bien celui-là. Bizarrement, pour les historiens et les hagiographes, ce saint est un illustre inconnu. Une certaine tradition franc-comtoise suggère qu’il s’agirait peut-être d’un soldat chrétien d’une légendaire légion thébaine devenu martyr au VIIIe siècle, et que ses reliques seraient conservées dans l’église du village de Saint-Amour, dans le Jura. Mais le doute est permis.
Par chance, s’il est inconnu des historiens, il ne l’est heureusement pas des amateurs de vin qui savent bien à quel saint se vouer. Sa robe rubis à l’éclat velouté et ses arômes de kirsch, d’épices et de réséda, loin de dissimiler son corps tendre mais bien présent, ne font que mieux mettre en valeur son harmonie. Ce beaujolais au si joli nom se laisse volontiers accompagner de petites cailles, au porto ou rôties aux cerises, mais des filets mignons de porc lui conviennent aussi à merveille.
C’est précisément un 9 août, en 1535, que Jacques Cartier découvre l’embouchure du Saint-Laurent qu’il avait d’abord confondue avec le mythique passage du Nord-Ouest entre Atlantique et Pacifique. Selon la coutume, il baptise le fleuve du nom du saint du jour. Par chance, il se trompe de jour et le baptise d’après le nom du saint du lendemain : ‘Laurent’. Sans cela, le Saint-Laurent se serait appelé Saint-Amour ! Les Québécois l’ont échappé belle !

Tout autre chose…

Saartje Baartman, surnommée la « Vénus hottentote ». Un autre visage du colonialisme.

C’est le 9 août 2002, il y a tout juste 20 ans, et près de deux siècles après sa mort misérable à Londres, en 1815, que Saartje Baartman, surnommée la « Vénus hottentote », a retrouvé son pays d’origine, où ses restes ont été inhumés.
Elle avait quitté l’Afrique du Sud en 1810 pour devenir un objet de curiosité en Europe. Après sa mort, son corps a été étudié par des scientifiques français, dont l’anatomiste Georges Cuvier qui l’avait lui-même disséqué, s’en prenant sans détour à ses organes sexuels en raison de leur apparence jugée particulière.
Ses restes ont été conservés dans les collections du Musée de l’Homme à Paris sans faire l’objet d’inventaire.
Le paléontologue et historien des sciences, Stephen Jay Gould raconte qu’Yves Coppens, alors professeur au musée de l’homme, lui avait montré le bocal contenant les restes d’organes sexuels de Saartje Baartman sur une étagère, juste au-dessus du cerveau du médecin Paul Broca (Stephen Jay Gould, « Le sourire du flamant rose », Points sciences, p.314 et ss.).
Après avoir expliqué en quoi Broca s’était trompé du tout au tout avec ses théories raciales, notamment à propos de Saartje, Stephen J. Gould note que Saartje a encore le dessus sur Broca. « Son cerveau à lui se décompose dans un bocal qui fuit. Son sexe à elle trône au-dessus, et son squelette bien préservé le surveille d’en bas. »
Aujourd’hui, Saartje Baartman est inhumée, quant au cerveau de Broca, il doit continuer à se morfondre en compagnie du crâne de Descartes et de celui de Cro-Magnon.

 

Encore tout autre chose…

Betty Boop, une certaine image de la femme dans les années ’30.

Ce 9 août, une irrésistible pin-up fête ses 92 ans. Et toujours aussi glamour ! C’est Betty Boop, née le 9 août 1930 sous le crayon de Max Fleischer, avec l’aide d’une équipe d’animateurs.
Elle est apparue à l’origine dans les séries de dessins animés produits par les studios Fleischer et diffusés par Paramount Pictures. En véritable star, elle a tourné dans 90 films entre 1930 et 1939.
Betty Boop fait sa première apparition dans le dessin animé « Dizzy Dishes ». Elle est alors un personnage à la fois féminin et animal, une sorte de caniche anthropomorphe. Mais il ne lui faudra que quelques années pour transformer ses oreilles de chien en boucles d’oreilles et devenir le sex-symbol miniature que l’on connaît. Avec ces cils envoûtants et ses poses sexy, Betty Boop réconforte comme elle peut une Amérique qui souffre de la grande dépression des années ’30.
Sa manière de combiner un aspect enfantin avec un look sophistiqué – un grand visage rond de bébé avec de grands yeux et un petit nez en forme de bouton, encadré dans une coiffure plutôt soignée, son très petit corps au buste qui s’affirme et se longues jambes galbées – composent un personnage délicieusement séduisant. Trop sans doute puisque, vers le milieu des années 1930, ses producteurs seront contraints de l’édulcorer pour correspondre aux règles particulièrement puritaines du code Hays destiné à apaiser les groupements religieux qui, par leurs pressions systématiques et les coupes qu’ils exigeaient, menaçaient l’économie du cinéma.
Rendue plus sobre, Betty Boop est néanmoins devenue l’un des personnages de bande dessinée les plus connus et les plus populaires au monde. Unique parmi les personnages féminins de dessins animés car elle représentait une femme sexuée et moderne, à la différence d’autres personnages féminins de dessins animés de la même époque, comme Minnie Mouse, qui restaient des personnages enfantins ou comiques, sans être femmes à part entière.
C’est sans doute ce qui fait le succès de Betty Boop auprès du public adulte, les dessins animés, vaguement surréalistes, contenant des éléments sexuels ou psychologiques, notamment dans ce « Talkartoon » de 1932 : « Minnie the Moocher ». Dans ce dessin animé, après un conflit avec ses parents psychorigides, Betty s’enfuit de chez elle, accompagnée de son petit ami Bimbo, pour se perdre dans une grotte hantée. Un morse fantomatique (élaboré à partir d’images de Cab Calloway) chante la chanson de Calloway « Minnie the Moocher », accompagné de fantômes et de squelettes.
Ce « Minnie the Moocher » servira de promotion pour les apparitions ultérieures de Calloway sur scène et contribuera à faire de Betty Boop une star de la bande dessinée.

André Clette

Un court extrait :
Cab Calloway – “Minnie The Moocher” (Extended Betty Boop Version)
C’est par ici : →

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