UN FOU DE CINÉMA par Mirko Popovitch

Lundi dernier au petit matin, Jean-Marie Piquint est décédé à VIVA, la résidence du CPAS de Jette.
Né en 1937, ce « fou de cinéma » dans la tradition des autodidactes de la première heure, a assumé une soixantaine de films entre 1958 et 2005. Ce sont quelques œuvres personnelles sous formes de fictions ou de docu-fictions, mais aussi une pléiade de films de commande pour des services publics ou des entreprises. J’ai collaboré à quelques-uns de ces travaux, notamment « A hauteur d’homme » son long métrage 35mm qui évoque la vie de Louis Seutin, médecin belge à l’époque napoléonienne.
Jean-Marie n’avait pas été soutenu par les pouvoirs publics pour ce projet, il s’est littéralement ruiné pour finaliser ce film tourné avec une centaine de figurants en uniformes d’époque.
Je me souviens des scènes de bataille dans lesquelles une flopée de grognards s’agitaient au milieu des galopades des cavaliers qui dans la fumée et le vacarme des pétarades traversaient le champ de vision, passaient de gauche à droite puis revenaient, repartaient. C’était Austerlitz, Waterloo !

Manu Bonmariage, André Goeffers et d’autres cameraman portaient à bout de bras des lourdes caméras (Arri 35).
Je courais de l’un à l’autre pour approvisionner les chargeurs, allumer les fumigènes, hurler aux figurants qu’il ne fallait surtout pas bavarder, pas quitter leur personnage.
Et de temps à autre, un footballeur du club local shootait sur un ballon peint en noir pour imiter un boulet de canon 1815.
C’était la manière dont Piquint, digne héritier de Méliès, aimait le cinéma.
Il bricolait, sautant allégrement du S8 au 35mm, du Betacam SP au H8.
Il y a peu, immobilisé sur son lit d’hôpital, il me sollicitait encore pour trouver une caméra et tourner une séquence sur les soins de santé du futur.

Étant un de ses derniers amis en vie, il m’a attribué la tâche de gérer les 60.000 livres et autres objets entassés dans l’appartement qu’il louait près de sa chambre de la résidence Viva.
Impossible n’est pas français, ma femme et moi avons pu réduire à +/- 5000 le stock de bouquins scribouillés d’annotations et références que cet intellectuel de haut vol exprimait à temps plein entre 6h du matin et 22hoo.
J’ai pu déposer les films et copies des œuvres de JM Piquint à la Cinémathèque de la Fédération Wallonie Bruxelles.
Il sera incinéré au Crématurium de 1980 Zemst, 50 Erasmuslaan, le lundi 2 décembre à 12H30.

Mirko Popovitch (sur facebook)

Sur les photos du film “A hauteur d’Homme“, on reconnait Thylou Beniest. Armando Ferreira, Frank, Pierre de Heusch, Fernand Tack, Chris Cornil, Michel Legros, Claude Dartevelle, …

1 Commentaire
  • Mirko Popovitch
    Publié à 05:04h, 02 décembre

    Je viens de recevoir un complément envoyé par Michel Baudour, Directeur photo et cameraman, qui a également travaillé avec JM Piquint vient de compléter le portrait du cinéaste: ” Voici une bien triste nouvelle car Jean-Marie était un vrai passionné du cinéma et de cette période de l’histoire napoléonienne . J’habitais av Baron Seutin à Waterloo et par lui je connaissais l’histoire de ce médecin qui opérait avec sa scie sur les champs de bataille.
    Je nous vois encore, avec Manu , avec notre uniforme et notre toque sur la tête pour être confondus dans la bataille mais chacun avec son Cameflex bataillant parmi les grognards. Nous voyageons dans sa Saab immatriculée 26SU7 …
    Il avait toujours la chemise qui sortait de son pantalon… mais quel homme passionnant et cultivé et volontaire et audacieux … C’est une époque qui se termine avec lui mais « À hauteur d’homme » reste pour moi une œuvre bâtie avec des ronds de ficelle mais d’une grande humanité comme lui (Michel)

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