VIE ET MORT D’UN VULVOLOGUE par Gwenaël Breës

Poète et philosophe cherchant à réintroduire du sacré dans l’art, Jean-Claude Lagarde, plus connu sous le nom de Claudius de Cap Blanc, était l’auteur de machines surréalistes explorant le vide affabulatoire (le retardateur d’échéance, la balance à peser le pour et le contre, la machine à tourner les sangs, la machine à verser dans le tragique…).
Il aimait aussi graver “le signe de la vulve“, vieux d’un million d’années, pour “revendiquer la cause féminine” et célébrer la fécondité de la Terre. Il le faisait notamment par le biais de sculptures à ciel ouvert sur des arbres et des roches des montagnes ariégeoises.

Mais cela déplaisait à certains, au premier rang desquels des élus et fonctionnaires qui n’y voyaient que perversion sexuelle et “dégradation du bien d’autrui“.
Au lieu de mettre en valeur sa contribution au patrimoine local (au Mas-d’Azil, le Musée de l’Affabuloscope (1) est dédié à l’œuvre de Claudius), ils l’accablèrent d’une succession de tracasseries administratives, censures, procès, amendes et même une peine de deux mois de prison…
Jusqu’à ce que cet été, l’Office National des Forêts le mette en demeure de “remettre en état” le Jardin du Vulvolithique qu’il élaborait depuis une quinzaine d’années au lieu-dit de le site de Béthylac, à 1500 mètres d’altitude.
Un jardin rempli de totems rendant hommage entre autres aux Femen du monde, à Louise Michel, Rosa Parks, Henry David Thoreau, Bobby Sands, etc. En octobre, ledit jardin, que Claudius venait d’achever, fut saccagé (2).

Machine à sêcher les larmes

Pour Claudius, c’en était trop. Ces dernières semaines, il publia plusieurs vidéos belles et poignantes sur sa chaîne Youtube (3), qu’on peut voir aujourd’hui comme une sorte de testament – l’une d’elle, intitulée “Sinon”, explore les liens entre l’humain et le bâton (la canne).
Vendredi 11 novembre, Claudius gravit une dernière fois la montagne. Épuisé par ces années d’acharnement contre lui, il se donna la mort au milieu de son jardin, laissant une lettre où il insiste sur le fait que son acte n’est pas un suicide.
Qu’importe qu’on dise maintenant que c’était un original, un fou, ou un artiste génial mais incompris : il ne sera plus là pour l’entendre. Mais il aura été entier jusqu’au bout.

Gwenaël Breës

(1) https://museeaffabuloscope.fr/
(2) voir la vidéo ci-dessous
(3) https://www.youtube.com/channel/UCKKOv4m52T2fKQsM4erDnPg/videos

 

 

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