PECHE A LA LIGNE ET “USINES À VIEUX”

Que faire des plus âgés d’entre nous, quand les corps s’ankylosent et que les esprits s’embrouillent ? “L’or gris” est aujourd’hui côté en Bourse, mais les Maisons de Retraites vivent sous le régime du rationnement. Témoignage de Claire, qui a dû “placer” ses parents avant de les reprendre chez elle.

 

L’allongement de l’espérance de vie, en ouvrant les portes du “quatrième âge”, a généré un nouveau secteur d’activités : les “usines à vieux”.
Le “troisième âge”, c’étaient les pensionnés des films de Renoir, canne à pêche, pastis et pétanque, supposés vivre un éternel dimanche après une (dure) vie de labeur.
Le “quatrième âge”, c’est la suite de l’histoire : la carcasse qui se grippe, la maladie qui s’installe, une déchéance physique ou mentale qui peu à peu réduit l’autonomie, et finit par nécessiter un environnement médicalisé permanent.
Dans les sociétés paysannes traditionnelles, c’étaient le plus souvent les familles qui s’occupaient “des vieux”. “Pépé” ou “mémé” gardait une chambre à la ferme, sa place au coin du feu, et “rendait service” en participant à l’une ou l’autre tâche de la maison.
La basse-cour, le potager, le fourneau.
Mais pour les plus indigents, il y avait déjà “les hospices”, où l’on empilait pêle-mêle des fous, des malades et des vieillards. Car les hospices se confondaient encore souvent avec les hôpitaux. Longtemps tenus par les seuls religieux, ils furent peu à peu repris en charge par les pouvoirs publics.

Avec l’urbanisation, l’industrialisation et le développement des habitats “mono-familiaux”, “les maisons de repos” se sont multipliées.
Et parallèlement aux lieux gérés par l’église, les mutuelles ou l’état, de nombreuses initiatives privées ont vu le jour, dans cet étrange secteur entrepreneurial à cheval entre l’hôtellerie et les soins de santé.
Mais depuis vingt ou trente ans, le secteur des “maisons de repos” a complètement changé de visage. Il s’est industrialisé, ou plutôt, il s’est “financiarisé”.
“L’or gris” a trouvé ses capitaines d’industrie et ses rentiers.
Des sociétés multinationales comme ORPEA et KORIAN gèrent aujourd’hui des dizaines de milliers de lits, dans des centaines d’établissements en Europe.
Ces deux sociétés sont même entrées en Bourse, depuis 2002 et 2006, et elles visent, pour leurs oisifs actionnaires, des rendements annuels à deux chiffres.
Pour ce faire, pas de secret : “management” à la cravache, compression du personnel, rationnement des soins, du matériel et de la nourriture.

Le “personnel” se limite parfois à trois aides-soignantes pour 180 pensionnaires.
Pour un coût mensuel qui tourne en moyenne entre 2 et 3000 euros, et jusqu’à 7000 euros dans certains établissements, le budget “nourriture” est souvent limité à… 5 euros par jour ! Pour trois repas et deux “en cas”. A dix heures, c’est un “Pepito” par personne. A quatre heures, une tasse de café chaussette et un petit beurre.
Pour les incontinents, les couches culottes sont rationnées à deux ou trois par jour (… et vis dans ta merde si tu dépasses les quotas !). Or de tels budgets et de telles conditions de travail conduisent mécaniquement à des actes de maltraitance vis-à-vis des pensionnaires. Appliqué à des personnes qui sont souvent en situation de dépendance, ce type de “management” a nécessairement des effets délétères. C’est “Oliver Twist” chez les vieux.

Agnès Buzyn, l’ancienne ministre la santé, pendant une intervention de Ruffin sur les EHPAD

Dès sa prise de fonction, en 2018, le député LFI François Ruffin avait alerté ses collègues sur la situation catastrophique dans les EHPAD. Et pour cause : son assistante parlementaire était elle-même aide-soignante dans un de ces homes. Aux premières loges pour constater le désastre.
La même année, une “marée blanche” de dizaines de milliers de travailleurs et travailleuses des EHPAD déferlait pour exiger de meilleurs conditions de travail et des budgets de fonctionnement plus “humains”. Certains directeurs accompagnaient même “leurs” travailleurs dans la rue.
Mais à part quelques vagues promesses de la Ministre de la Santé, rien n’a changé depuis. Là dessus a débarqué le COVID 19 et la pandémie, qui, pendant deux ans, ont transformé chaque maison de retraite en un huis-clos tragique. Plus de visites extérieures. Un personnel, déjà en sous-effectifs, décimé par les quarantaines. En quelques semaines, certains de ces lieux se sont ainsi transformés en prisons et en mouroirs. Les hôpitaux étaient débordés, et le quatrième âge ne faisait pas vraiment partie des priorités. En médecine d’urgence, on soigne d’abord ceux qui peuvent sauvés. Les autres, on les “aide” à mourir.

On ne peut toutefois pas éternellement cacher la merde et la poussière sous le tapis.
Au début de cette année, sont sortis coup sur coup le livre de Victor Castanet, “Les Fossoyeurs“, et l’émission d’Elise Lucet, “EHPAD : l’heure des comptes ?”, dans “Cash Investigation”.
Ils documentent tous deux les multiples maltraitances réservées à nos aînés dans les EHPAD. Oui, des financiers et des rentiers se font aujourd’hui des couilles en or et des ovaires en titane en rationnant la “fin de vie” des vieux.
La “marchandisation du monde” en mode film d’horreur, pas très loin du film d’anticipation “Soleil Vert”, où, sur fond de violons sirupeux, les très vieux finissaient par être discrètement transformés… en aliments.
Terminons toutefois nous aussi par une petite note humoristique.
Quand elles évitent les Vierges, les Saints et les Princesses, héritages de leur origine “catho”, les Maisons de Repos sont très douées pour donner des noms bucoliques à leurs poétiques institutions. “Le clos fleuri”, “Le Manoir du Bonheur”, “La Grange aux Champs”, “Le château du Val”, “Le Paradis de Rocourt”… Il doit y avoir quelque part un amusant générateur de “noms de homes” dans un tiroir secret de l’Oulipo.
ORPEA est d’ailleurs l’acronyme de Ouverture, Respect, Présence, Ecoute, Accueil.
Ben, voilà ! On a déjà le titre. Il n’y a plus qu’à suivre le programme…(1)

 

(1) https://www.la-croix.com/France/Scandale-Orpea-non-publication-rapports-denquete-pose-question-2022-03-27-1201207214

(Lire sous la photo l’interview de Claire Kirkpatrick)

Claire, ses parents, et un de ses oeuvres à l’avant-plan

Interview de Claire Kirkpatrick

En contrepoint à ce petit topo historique, voici le témoignage de Claire.
J’ai bien connu ses parents, qui assistaient souvent à mes spectacles. C’étaient des gens charmants.
Et bien qu’ils aient été placés dans un “chic home” ucclois, leur séjour a visiblement été très assez éprouvant pour eux, particulièrement pendant la période de la pandémie.
Ce qui a amené Claire à finalement “reprendre” ses parents chez elle. Oui, comment et avec qui vit-on sa “fin de vie” ? Autant nous poser la question tant que nous sommes encore en état de le faire.

Claude : “Placer” ses parents en maison de retraite, même quand ils ont eux-mêmes fait ce choix, est toujours une décision difficile à prendre. Qu’est-ce qui vous y a poussé ?

Claire : Papa a eu un couac au cœur, qui a nécessité une grosse opération chirurgicale.
Quand il est sorti de l’hôpital, il avait besoin d’une assistance médicale permanente, et on ne pouvait pas le reprendre à la maison. Ma sœur ainée a trouvé un home “haut de gamme” à Uccle, qui s’appelle “Les Fleurs d’Aubépines”. Ce n’était pas trop loin de la maison de mes parents, et ils y avaient déjà des amis et des connaissances.
Papa est arrivé là en très mauvais état de santé, en 2018, mais il s’est assez vite et assez bien adapté. Maman faisait la navette tous les jours en bus pour aller le voir.
Jusqu’au moment où on s’est rendu compte que pour Maman, Alzheimer était bien là : elle sautait des repas, elle se perdait dans le bus. On l’a finalement poussée à aller loger là-bas avec papa. Ils avaient ensemble comme un petit appartement. Mais cela a été une catastrophe pour elle. Elle disait “Il n’y a que des vieux, ici !”.
Elle détestait, elle détestait. C’était dur aussi pour mon père, qui s’était enfin adapté là-bas, car c’était plutôt un homme accommodant et sociable. Mais il était quotidiennement confronté à cette hostilité de ma mère, et ça le minait.

Claude: Comme tu le sais, j’ai bien connu tes parents, qui assistaient souvent à mes spectacles. C’était un couple dynamique, solaire, souriant, et ton papa était un des responsables d’une locale d’ECOLO. Passer de là à une situation de dépendance, que ce soit pour des questions purement physique ou mentales, et entrer ainsi de plein pied dans le “quatrième âge”, cela doit être un moment très difficile à gérer.

Claire : Cela a été un enfer. En fait, maman ne l’a jamais accepté. Mais on n’avait pas d’autres solutions, même si on espérait que papa puisse un jour aller mieux et sortir de là. Ils étaient locataires d’une maison qu’on a donc dû vider, et on a résilié le bail. Puis est arrivé l’horrible pandémie, et là c’est devenu catastrophique.
On ne pouvait plus les voir qu’une fois par semaine, puis une fois tous les quinze jours, et toujours la même personne de la famille, derrière un plexiglas, dans une salle commune où il y avait un brouhaha insensé, on ne s’entendait pas, on ne pouvait pas se toucher, c’était terrible. Ils restaient tout le temps enfermés dans leur chambre, et maman, avec sa maladie, elle doit déambuler, elle ne supportait pas ça du tout cet enfermement.
Elle devenait agressive avec papa, à force d’être enfermée 24 heures sur 24 dans une petite pièce. Le temps est pourtant passé comme ça, on se voyait de moins en moins souvent, et on a vu l’état de papa terriblement se dégrader.
Il était prostré dans une chaise roulante, recroquevillé sur lui-même, il ne parlait plus, il ne relevait même plus la tête. Je me suis dit qu’on allait le perdre dans cet état-là, et avec ma compagne, Bérangère, on a décidé en janvier 2021 de le sortir de là.

Claude : Tes parents logeaient ensemble ?

Claire : Oui, pas tout au début, mais ensuite on a pu les loger ensemble. C’était comme un minuscule appartement, avec une chambre et un coin salon.

Claude : Excuse-moi de revenir un peu en arrière, mais lors du placement de ton père, vous aviez fait une “étude de marché” ?

Claire : Oui, on avait aussi pensé à ces “vrais” appartements, où tu peux parallèlement disposer de divers services médicaux et ménagers.

Claude : Et c’est quelle gamme de prix (1) ?

Claire : Là, on payait 7000 pour les deux.

Claude : 7000 euros ! Purée… Et il y a une intervention de la Mutuelle, là-dessus, ou bien…

Claire : Rien du tout. On a eu “de la chance” qu’ils aient une bonne pension, sinon…
Bon, il y avait des homes plus “sociaux”, plus humains et moins chers, comme à Chièvres où Bérangère habite, mais mes sœurs ne voulaient pas faire les trajets, et comme il y avait l’argent, on les a laissés à Uccle…

Claude : C’est dingue, comme tarif !

Claire : Mais tu sais qu’avec maman seule à la maison… c’est presque autant !
C’est impossible pour la plupart des gens de pouvoir se payer cela.
Il faut un bataillon d’aides ménagères et médicales pour qu’on puisse garder nous-mêmes un minimum d’indépendance et continuer à travailler, des kinés, des infirmiers, des gardes de nuit, 24 heures sur 24. Cela reste très compliqué. Il y a tout le temps des absences, tout le temps des malades, on est toujours prévenues à la dernière minute. Et c’est bien sûr toujours nous qui devons “compenser”.

Claude : Donc, en janvier 2021, vous décidez de sortir tes parents de là. La dégradation de l’état de ton père, c’était d’ordre psychologique ou physique ?

Claire: Les deux. Il ne marchait plus, et on l’avait casé sur une chaise roulante. Pendant la pandémie, ils n’ont plus vraiment eu le temps de s’occuper des gens. On a retrouvé papa avec une rage de dent épouvantable, qui durait depuis des semaines, et qui n’était pas soignée. Il avait “perdu” son dentier. Et il avait un coup sur la tête, je ne sais pas très bien ce que c’était. Et maman, elle avait les deux poignets bleus, je suppose qu’ils la ramenaient tout le temps de force dans sa chambre, ou qu’on l’attachait, je ne sais pas, et elle avait aussi une blessure au tibia, avec un vieux pansement purulent. Voilà, on les a “repris” comme ça.
Mais paradoxalement, chez nous, au début, cela a aussi été un dépaysement très dur. Bérangère et moi, on a d’abord tout, tout, tout assuré.
Mais au bout d’un mois, nuit et jour, on n’en pouvait plus, on était au bout de nos forces. Maman, dépaysée, faisait pipi partout dans la maison, et papa faisait toutes les nuits des cauchemars terribles. Lui ne savait plus bouger, en fait. Il ne savait plus manger tout seul. C’était très lourd. Et ma mère, on ne pouvait pas la laisser seule une demi-heure. Elle peut tomber, faire une crise ou s’enfuir. Hier, il y a eu un décalage de vingt minutes entre la garde de nuit et l’aide-familiale, elle avait fait pipi dans son lit et pleurait désespérément à la porte de sa chambre “parce qu’il n’y avait personne”.

Claude : Et puis, à un moment, tu as perdu ton papa ?

Claire : Oui, mais avant ça, il a recommencé à parler, à apprécier les repas, à faire des “feintes” comme dans le temps, à draguer les aides familiales quand elles étaient mignonnes… il a même recommencé à marcher… enfin, la vie, la vie, tous ses petits-enfants, ses arrières petits-enfants, on a fait des fêtes formidables à la maison, c’était vraiment une renaissance.
Et puis papa est mort trois mois plus tard, mais on l’a tellement accompagné, jusqu’à son dernier souffle, on a été avec lui, autour de son lit, et c’était merveilleux de pouvoir faire ça. Quand je pense qu’il aurait pu mourir tout seul sur sa chaise roulante…
Maman, a cause de son Alzheimer, et bien quelle soit venue à l’enterrement, elle n’a pas vraiment compris ce qui se passait. Elle le cherchait partout dans la maison.
Encore aujourd’hui, elle parle à son fauteuil vide comme s’il était toujours là. “Pourquoi on ne va pas à Bruxelles ? Aide moi ! Tu ne fais jamais rien…”. C’est assez pathétique, quoi. Sa maladie la dégrade très rapidement aussi.
C’est très rare qu’on puisse encore avoir quelques instants de vraies conversations avec elle.
Heureusement, Bérangère a retrouvé une ancienne élève à elle, quelqu’un de très généreux et de très attentionnée, mais qui vivait dans un quart-monde terrible.
Ma famille a proposé de la payer pour assurer une permanence auprès de ma mère l’après-midi, elle fait ça merveilleusement bien, et cela nous aide beaucoup.
Et mes sœurs viennent chacune une après-midi par semaine, elles ne peuvent pas donner plus. Et mon frère, qui ne supporte pas la situation et la maladie, il ne vient pas du tout. Quand mon père était encore recroquevillé sur sa chaise au home, pour lui, c’est comme s’il était déjà mort. Mais bon, c’est Bérangère et moi qui avons pris seules la décision de recueillir mes parents chez nous. Et on en assume les conséquences.

Claude : Je ne sais pas si tu sais, mais j’ai perdu mon papa l’été passé. Il était très âgé, 93 ans, et même s’il avait toute sa tête, il avait besoin d’aide pour les repas et les petits actes du quotidien. Quand sa femme a été hospitalisée pendant deux mois, suite à une chute et à une fracture, ma sœur, mon frère et moi nous nous sommes relayés auprès de lui pour assurer une garde. Puis sa femme est revenue de l’hôpital. Mais mon père avaient des problèmes urinaires qui l’empêchaient même d’aller au restaurant, Il faisait souvent des chutes, et elle devait appeler les pompiers, parce qu’elle n’avait pas la force physique de l’aider à se relever. Mais dès qu’on a évoqué un éventuel placement en home, parce que la vie quotidienne “normale” était devenue impossible, il a commencé à planifier son euthanasie.
On a ainsi vécu deux mois étranges avec lui, comme si il était devenu un mort-vivant. Et quand les médecins sont venus sonner à sa porte, le jour J, il s’est levé en disant : “Bon, passons aux choses sérieuses !“. Dix minutes après, il était mort.
Je crois que ce que les vieillards ne supportent pas dans les homes, c’est la perspective d’une infantilisation permanente, d’une perte de liberté, des contraintes des horaires collectifs et du contrôle des visites.
Aujourd’hui que la génération 68 arrive au seuil du quatrième âge, on devrait pouvoir réinventer des “communautés” de vieux autogérées, basées sur l’entraide, et non plus sous la contrainte ! Evidemment, dès qu’il faut gérer en plus la “démence sénile”, cela devient beaucoup plus compliqué…

Claire : Oui, c’est une belle idée. Et des lieux “intergénérationnels”, aussi ! Par exemple, maman adore voir les petits enfants. Elle renait, quand elle en voit !

Claude : Je sais que dans certaines communes de France, ils encouragent la formation de tandems “troisième âge / étudiant”, où ces derniers peuvent bénéficier d’un logement chez une vieille personne isolée, en échange de quelques coups de main au quotidien (courses, ménage, etc…).

Claire : Oui, et que des grands-parents puissent aller faire des lectures dans des crèches !

Claude : Dans tous les habitats traditionnels, cette cohabitation des générations existait “naturellement”, par exemple dans les vieilles fermes familiales. Quand j’ai habité quelques mois en Ariège, je fréquentais la ferme des parents d’un copain. Trois générations s’y côtoyaient, et la mémé avait son rôle dans la famille, les lapins, le potager, le cochon qu’on engraisse et son fauteuil au coin du feu, à côté du panier du chien. Bon, évidemment, c’était un mode de vie dont on héritait, qu’on connaissait depuis l’enfance, qu’on se transmettait depuis des siècles, avec partout la nature autour de soi. Quand tu voulais être seul ou respirer, il suffisait de pousser la porte et tu étais dans les champs.
Tu ferais la même chose dans un appartement en ville, tout le monde devient fou en une semaine, même le chien.
Bon, merci, Claire. Je ne sais pas si tu veux ajouter quelque chose ?

Claire: En un an, on est passé par des tas d’étapes, mais c’est très lourd pour Bérangère et moi. On se rend compte qu’on a vraiment mis notre vie entre-parenthèses. Et ce n’est pas seulement une question idéologique, c’est aussi une question de budget. Là, ma mère seule nous coûte 6.600 euros par mois. S’il n’y avait pas sa pension et l’héritage de mon père, seules, on ne pourrait pas l’assumer.
Mes sœurs et mon frère pensent régulièrement qu’il faudrait la remettre dans un home, mais je crois que si on fait ça, dans trois mois elle est morte. Ici, elle a un grand jardin, des animaux, des gens qui l’aiment, un tourbillon de visites. On n’imagine pas pouvoir la priver de tout cela, même si c’est très dur pour nous. Cette situation de dépendance est également très difficile à gérer entre fratrie, surtout quand on n’est pas tous du même avis. Mais bon… C’est comme ça !
Malgré les difficultés, tous les petits moments de bonheur nous confortent dans notre décision. Nous avons été écouter plusieurs concerts avec Maman, dont un concert africain, et un autre avec HK, où elle dansait au milieu de la foule. La culture et la musique lui font un bien fou.

Propos recueillis par Claude Semal le 27 mars 2022

(1) les prix qu’on nous a téléphoniquement communiqués en Belgique vont de 1200 euros “coiffeur compris” à plus de 3000 euros par mois. En France, la moyenne des “pensions complètes” tourne autour de 2500 euros.

Reportage photo: Claire et Bérangère

 

2 Commentaires
  • Anne Kirkpatrick
    Publié à 23:07h, 22 mai

    Très bel interview, Merci Claude de l’avoir publié dans ton journal

  • Manu Berquin
    Publié à 19:35h, 05 avril

    C’est très touchant, vos témoignages et vos photos.
    Suite à des expériences similaires, mon fils vient de créer avec d’autres une asbl qui voudrait mettre sur pied un projet alternatif. Leur site en construction: https://cabasa.be/

Poster un commentaire