LE CRAMÉ, L’ADIPEUX, LE SALÉ ET LE CHIMIQUE

Oh ! Non… Pas elles ! Après le fromage de Herve, voilà nos frites nationales clouées au pilori par l’Autorité Européenne de la Sécurité Alimentaire. Les frites, comme le pain grillé, contiendraient trop d’acrylamide, un produit dérivé des cuissons à hautes températures, et qui serait cancérigène chez les rats.
C’est trop injuste. Je ne suis pas un rat!
Pourquoi la Nature, qui pousse le jeune faon fébrile à ronger l’écorce du saule, nous précipite-t-elle toujours vers le gras et le cramé, le sucré et l’adipeux, le salé et le chimique, le fétide et le gluant ? Nos instincts sont-ils à ce point atrophiés qu’ils ne nous orientent plus que vers le toxique et le morbide ?
Cela fait vingt-cinq ans que je ne fume plus.
Je ne me suis jamais drogué. J’évite l’alcool au-dessus de 12°.
Avec deux verres de rouge par jour, je me refuse à ruiner les viticulteurs sans totalement désespérer les cardiologues.
Mais, entre OGM et dioxine, mercure et cholestérol, nitrates et pesticides, conservateurs et calories, que nous reste-t-il à manger ? Le plus pur des potagers « bio » n’est-il pas arrosé par les pluies de Tchernobyl et Fukushima ?
Gangrenées par une trentaine de traitements chimiques, voilà qu’on nous déconseille même de manger les pommes. Les pommes !
Et n’attendez aucune rédemption du sport.
Si vous n’êtes pas foudroyé par un ACV en plein effort, le plus humble des joggings vous promet, dans vingt ans, des ménisques en charpie, des vertèbres en biscotte et un col du fémur en titane.
Vivre est décidément devenu bien dangereux.
Buvons donc de l’eau filtrée en mâchouillant une poignée de graines crues, arrosées de jus de citron bouilli au curcuma, avec, pour seul digestif, le lent réconfort d’un mouvement de Tai-Chi.
Et nous ferons tous des centenaires perclus de santé — si nous ne sommes pas tous morts d’ennui avant.

Claude Semal

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