MON CHAPELET DE PAÏENNE par Dom Moreau

Lorsque j’étais enfant, le potager de mon père était immense. Du moins c’est le souvenir qu’il m’en reste. Mes étés étaient en partie consacrés à “traiter” les récoltes. Par exemple, je devais équeuter les haricots, avec mon petit couteau je sectionnais la tête (la mouche) et la queue. Je faisais ça par paquets d’une dizaine, pour aller plus vite… Car il y en avait des seaux entiers. Ma sensation, c’était le sans fin, ça ne s’arrêtait pas. Chaque jour, du moins c’est ce dont je me souviens. Nos souvenirs exagèrent-ils toujours ? Je devais aussi sortir les petits pois de leurs gousses. Et mes petits doigts malhabiles n’en pouvaient plus de chercher le fil, le sésame qui leur donnaient accès à la poussée de cette ribambelle de boules vertes pour qu’elles tombent dans l’immense plat, à remplir sans cesse après que ma mère les ait cuits pour la mise en congélation.
Je ne me souviens pas m’être occupée de fèves. Seulement qu’elles étaient un des seuls légumes que je consentais à manger. Je n’aimais que les pommes de terre, frites et purée, et la viande sans la moindre particule de gras. Je n’aimais rien, ou pas grand chose.
J’ai changé, même si j’aime toujours les fèves (non, je les adore). J’aime tous les légumes, absolument tous, je ne mange plus de viande depuis longtemps, et peu de pommes de terre. Et, aujourd’hui, j’aime beaucoup écouter le temps s’égrener, tranquillement, en même temps que j’égraine les petits pois de mon potager. C’est mon chapelet de païenne.

Dom Moreau (sur Facebook)

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